Supplice de millions de femmes à travers le monde, la pratique de l'excision ne connaît malheureusement pas de frontières. Si l'an dernier lors du Girl Summit, l'Unicef a constaté un recul des mutilations génitales à travers le monde ces trente dernières années, rien n'est encore joué pour enrayer cette pratique : 130 millions de femmes seraient aujourd'hui mutilées dans le monde et chaque année, 3 millions de filles sont exposées au risque de subir des mutilations sexuelles, qu'elles vivent en Afrique, en Amérique du Nord, en Amérique du Sud, en Australie, en Asie, au Moyen-Orient ou en Europe.
Pour lutter contre l'excision, symbole de la volonté de contrôle des hommes et des aînés sur le corps et la sexualité des femmes, l'association 28 Too Many (en référence aux 28 pays d'Afrique qui légalisent encore les mutilations génitales) vient de lancer une campagne mondiale choc.
Réalisée par l'agence de pub britannique Ogivily & Mather, elle détourne intelligemment les drapeaux de pays occidentaux. Désacralisés, ces derniers sont désormais tâchés de sang, maladroitement rafistolés de points de suture rouillés. Une démarche symbolique, qui fait écho aux conditions sanitaires déplorables dans lesquelles ces mutilations sont souvent pratiquées et pour lesquelles de nombreuses femmes risquent leur vie. L'excision peut en effet provoquer de graves hémorragies et des problèmes urinaires, et par la suite des kystes, des infections, la stérilité, des complications lors de l'accouchement. "Les mutilations génitales féminines n'ont pas uniquement lieu dans des endroits reculés", rappelle le slogan de la campagne lancée par 28 Too Many.
Interdite dans une vingtaine de pays africains, en Europe, aux États-Unis et au Canada, l'excision – soit l'ablation totale et partielle des organes génitaux externes des femmes – reste malheureusement encore trop présente dans le monde. Pratiques millénaires invoquées pour des raisons sociales ou religieuses, les mutilations génitales féminines sont encore pratiquées en toute légalité dans 28 pays d'Afrique. En Somalie, 98% des femmes entre 15 et 49 ans ont été mutilées, elles sont 96% en Guinée, 93% à Djibouti 93%, et 91% en Égypte. Au Kenya, en Tanzanie et au Ghana, l'excision tend en revanche à diminuer. Les femmes plus âgées restent bien plus touchées par le phénomène : au Kenya et en Tanzanie, elles sont trois fois plus chez les 45-49 ans que chez les 15-19 ans.
Toutefois, l'Unicef et l'OMS ont observé une tendance à l'abandon progressif de cette pratique ces dernières années. Le niveau d'instruction des femmes joue d'ailleurs un rôle déterminant et les baisses les plus significatives s'observent dans les familles les plus instruites. Au-delà de l'adoption de législations cependant, les actions de prévention et de sensibilisation comme celle menée par 28 Too Many demeurent nécessaires. Il faudra d'ailleurs sûrement encore de nombreuses années pour faire évoluer les mentalités et faire cesser définitivement la pratique de l'excision.