À Ciudad Juarez, ville mexicaine frontalière d'El Paso, au Texas, trafic de drogue et règlements de compte font partie du quotidien. En 2010, la ville, qui compte près d'1,5 million d'habitants, a recensé 3 000 homicides, rapporte Le Monde. Depuis plus de vingt ans, les femmes sont les premières victimes de cette violence. Dans les années 1990 et au début des années 2000, plus de 2 500 d'entre elles, qui se rendaient à leur travail dans les maquiladoras - ces manufactures situées sur la frontière - avaient été retrouvées sans vie ou ont tout simplement disparu, sans laisser de traces.
Malgré une vaste manifestation des femmes de la ville, en 2007, pour forcer la police à enquêter sur les meurtres et les disparitions, la violence dans la ville continue de sévir et les femmes sont toujours victimes de violences sexuelles.
De quoi pousser l'une d'entre elles à se faire justice elle-même. Les 28 et 29 août dernier, elle aurait abattu d'une balle dans la tête deux conducteurs d'autocar, accusés d'avoir agressé sexuellement des femmes qu'ils conduisaient au petit matin jusqu'à leur lieu de travail, les fameuses maquiladoras.
Celle qui s'est autoproclamée « Diana, la chasseuse de chauffeurs » a fait parvenir aux journaux locaux un e-mail, dans lequel elle revendique ses crimes, et annonce que d'autres suivront si rien n'est fait pour arrêter les violeurs. « Mes camarades et moi avons souffert en silence, mais nous ne pouvons plus nous taire, nous avons été victimes des violences sexuelles de conducteurs qui assuraient les liaisons nocturnes des maquilas ici à Juarez, mais même si les gens connaissent notre souffrance, personne ne nous défend ni ne fait rien pour nous protéger. La société croit que nous sommes faibles, mais nous sommes fortes et si on ne nous respecte pas, nous imposerons le respect de nous-mêmes. Les femmes de Ciudad Juarez sont fortes [...] Je suis un instrument de vengeance », annonce-t-elle.
La police, qui a dans un premier temps penché pour la piste d'une « vengeance ou d'un crime passionnel », est donc à présent à la recherche de « Diana », que des témoins ont identifié comme une femme brune d'une cinquantaine d'années, mesurant environ 1,65 mètre et portant une perruque blonde. Un portrait-robot de la justicière a été établi, et diffusé à proximité des maquiladoras.
Si les méthodes choc de Diana pour venger ses amies violentées risquent fort, si elle se fait arrêter, de lui valoir un long séjour en prison, elles auront au moins permis de relancer l'intérêt des autorités sur les affaires de violences sexuelles commises par les chauffeurs d'autocar. Selon Le Monde, depuis la fin du mois d'août, des policiers en civil ont été déployés pour surveiller les lignes de bus. La police s'est aussi à nouveau penchée sur 12 cas de viols perpétrés par des chauffeurs pour déterminer si Diana fait partie des victimes.
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