Choqué par la fusillade de l'école Sandy Hook, au Connecticut, en décembre 2012, ainsi que par d'autres tragédies toutes aussi mortelles, Steve Walker, podologue originaire de l'Oklahoma, a pour la première fois imaginé une couverture blindée destinée aux enfants. Il a depuis fait de son projet une réalité en co-fondant ProTecht. Le produit, nommé « Bodyguard Blanket », ou « couverture garde-du-corps », est un rectangle de 13 par 40 centimètres réalisé dans un matériau que l'entreprise présente comme étant cinq fois plus résistant que le kevlar, censé protéger face à « 90% des armes utilisées lors des fusillades ».
À 1.000 dollars environs l'unité, soit 740 euros, il est peu probable que les écoles américaines, pour certaines sous le coup de restrictions budgétaires, mettent la main à la poche. Mais les fondateurs de ProTecht vantent également leur couverture comme étant également une protection alternative contre les débris, notamment en cas de tornade, un phénomène fréquent en Oklahoma. La société parierait donc sur les écoles ne disposant pas d'abris anti-tornade et pour qui investir dans la « Bodyguard Blanket » reviendrait moins cher.
Chose peu surprenante, lesdites couvertures sont loin de faire l'unanimité, comme l'attestent les nombreuses réactions sur le réseau de microblogging Twitter. « Nous vivons dans un monde où un produit comme celui-ci existe et est utile », réplique pourtant un internaute. « La réponse aux fusillades dans les écoles ne devrait pas être d'imaginer des couvertures pare-balles » s'indigne un autre, tandis qu'un énième lance un grinçant et ironique « produit génial, culture géniale ».
We live in a world where a product like this exists and is viable. http://t.co/Tqo5H1Di85 #wtf
— Saud Qureshi (@SaudQureshi) 10 Juin 2014
The answer to stopping deaths from school shootings shouldn't be to make bullet proof blankets for children. http://t.co/6PtXdjf7GK
— Stefan Constantine (@WhatTheBit) 10 Juin 2014
cool product! cool culture! http://t.co/G7MKBr8CIc
— Brian Feldman (@BAFeldman) 9 Juin 2014
Car, au-delà de l'affairisme supposé ou réel de la société ProTecht, c'est bien la culture américaine qui est une nouvelle fois remise en cause. Une société qui, en vertu du second amendement de la constitution, autorise le port d'armes afin de garantir au peuple le droit d'auto-défense, notamment contre un tyran. Les partisans d'une législation beaucoup plus stricte ont beau jeu de faire remarquer que la menace de totalitarisme est moins présente que celle que font peser, au quotidien, des déséquilibrés férus d'armes de poing et autres fusils d'assaut.
Dit plus prosaïquement, lorsqu'un énergumène tire sur des enfants et que l'on propose non pas de lui retirer son arme, mais de fabriquer des couvertures pare-balles, ça choque. La société ProTecht, elle, n'est évidemment pour rien dans la rigidité de la législation et n'est mû que par le principe de l'offre et de la demande. Les affaires sont les affaires… Le reste est du ressort des élus. En attendant, une nouvelle fusillade a eu lieu hier, mardi 10 juin, dans un lycée près de Portland. Un élève a perdu la vie.
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