Culture
François Hollande ou « la force du gentil »
Publié le 15 février 2012 à 14:44
Par Marion Roucheux
Qui se cache derrière la façade de l'homme politique gentil et affable qui brigue la candidature à la présidentielle au nom du PS ? Quelle est sa véritable personnalité et quelle relation a-t-il au pouvoir ? La gentillesse peut-elle constituer une force politique ? Dans « François Hollande ou la force du gentil » paru aujourd'hui, Marie-Ève Malouines* revient sur le portrait pas si lisse du candidat socialiste.
François Hollande ou « la force du gentil » François Hollande ou « la force du gentil »
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Terrafemina : François Hollande est gentil. Mais cela l’empêche-t-il d’être combattif et crédible en politique ?

Marie-Ève Malouines : C’est une image que l’on donne beaucoup de François Hollande, cet aspect naïf, léger, docile. Or, quand on le rencontre et qu’on analyse son parcours, on voit également un véritable stratège, qui vient de loin et a su construire sa carrière politique sur le long terme, jusqu’à la candidature à la présidentielle. Cela ne l’empêche pas de faire en effet preuve de gentillesse : s’il est gentil, c’est parce qu’il n’aime pas les rapports de force, il refuse les conflits et ne retire aucun plaisir à imposer son autorité par la force, il préfère jouer de l’humour. Cela ne veut pas pour autant dire qu’il est naïf : au contraire, c’est un homme politique opiniâtre, très ambitieux et qui de toute évidence n’est pas où il est par hasard. Au cours d’une émission en mai dernier que j’animais, alors que Dominique Strauss-Kahn n’était pas encore évincé de la course aux primaires socialistes, François Hollande expliquait pourquoi il était certain qu’il allait l’emporter pour ces élections internes. Il se dégageait de lui à ce moment-là une certitude, une conviction intime qui laissaient percevoir le François Hollande du discours du Bourget.

Tf : Son parcours est-il le fruit de concours de circonstances bienheureux comme le disent certains de ses détracteurs ou bien le résultat d’une stratégie bien huilée ?

M.-È. M. : François Hollande a construit toute sa vie autour de son ambition politique. Très jeune il cherche déjà à s’engager en politique : sa volonté est d’investir la société, pour la changer de l’intérieur. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’à sa sortie de l’ENA il soutient la candidature de François Mitterrand : non par idolâtrie, mais parce qu’il lui semble le plus à même de conquérir le pouvoir. Ce pari lui permet de découvrir l’Élysée et pendant un septennat d’explorer tout le panel de l’exercice du pouvoir. Il construit déjà son carnet d’adresses et son réseau en touchant à tout : il est tour à tour gestionnaire des fonds de l’Élysée et de SOS racisme, directeur de cabinet de Max Gallo porte-parole du gouvernement, journaliste… J’ai découvert en menant cette enquête beaucoup de détails de son parcours sur lesquels il est toujours resté discret et qui montrent à quel point il est introduit dans le pouvoir. M. Hollande a en parallèle toujours caché son attrait pour le pouvoir. Alors dissimulation ou effacement ? Je pense que c’est une question de bon moment : tant que son heure n’était pas venue, il ne se dévoilait pas. Comme l’analyse Jean-Christophe Cambadélis, qui fut longtemps son numéro deux, « c’est un sismographe de l’instant », « il analyse les mouvements du moment pour assurer sa stabilité ». François Hollande sait se positionner au bon endroit et au bon moment. C’est ainsi par exemple qu’il n’a pas présenté sa candidature en 2007, mais estime être « dans son moment » pour 2012.

Tf : Pensez-vous comme lui que 2012 est « son moment » et qu’il peut convaincre les Français face à Nicolas Sarkozy ?

M.-È. M. : Cela reste évidemment la grande inconnue pour l’instant ! Ce que l’on peut observer, c’est qu’en 2007, la campagne a opposé deux personnalités très fortes, Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal, qui étaient dans l’affrontement et un permanent rapport de force. Aujourd’hui, avec la crise politique et économique que nous traversons, les électeurs ont envie de changement. Ils ont plus envie d’être apaisés et rassurés par un homme d’État. Reste à savoir s’ils opteront pour un profil de personnalité politique apaisée et porteuse de consensus plutôt que vers des prises de positions se situant plus sur la confrontation et des rapports « virils ». Nous allons voir les prochains mois si la France évolue ou non en ce sens. Peut-être que la gentillesse sera un atout pour 2012.

*Marie-Ève Malouines est chef du service politique de France Info.

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