L'horreur a encore frappé en Inde. Alors qu'elle était sortie chercher du fourrage pour nourrir les cinq buffles de la famille près de son village de Bool Garhi, dans l'Etat d'Uttar Pradesh, frontalier de New Delhi, une jeune femme de 19 ans a été violée, torturée et tuée par quatre hommes ce 14 septembre. Sa langue aurait été coupée et sa colonne vertébrale brisée après qu'elle ait été traînée par le cou avec une corde, selon le récit de son frère, détaillé dans le New York Times. Traitée à l'hôpital de Uttar Pradesh, puis transférée à New Delhi, elle a succombé à ses blessures le 29 septembre.
Comme le précise Le Monde, la victime "était une dalit ("opprimé"), le nom qui désigne aujourd'hui les intouchables, situés tout en bas de la hiérarchie des castes indiennes. Ses assassins sont des thakur, une caste supérieure, très influente en Uttar Pradesh."
Toujours selon les propos du frère de la jeune femme, alors qu'elle venait de décéder à New Delhi, son corps aurait été transporté à Uttar Pradesh au petit matin et la police l'aurait fait incinérer en l'absence de la famille. Preuve, selon lui, que les autorités essayeraient d'étouffer la tragédie.
Selon le chef de la police d'Hathras, Vikrant Vir, quatre hommes auraient été arrêtés pour viol collectif et meurtre. Des centaines de membres de la Bhim Army, parti qui défend les droits des Dalits, ont manifesté devant l'hôpital où était soignée la jeune victime ce mardi 30 septembre. L'un des leaders du parti a demandé aux Dalits de descendre dans la rue afin de demander la pendaison des bourreaux.
Le Premier ministre indien Narendra Modi a réagi à ce drame en promettant que "la plus grande fermeté" serait prise contre les tortionnaires. Mais la justice peut-elle être rendue dans un pays où, sur les dizaines de milliers de cas de viols rapportés chaque année, seule une poignée aboutit à des poursuites comme le montre les chiffres éloquents du Bureau national des registres de la criminalité ? Pire, comme le souligne le New York Times, de très nombreuses victimes de viol ne portent pas plainte en raison de la stigmatisation de la violence sexuelle en Inde.
Cette nouvelle affaire sordide intervient alors qu'un autre viol fatal a été révélé par la police ce jeudi (1er octobre), également à Uttar Pradesh. Une jeune femme de 22 ans, elle aussi issue de la communauté dalit, a été sauvament violée par deux hommes dans le district de Balrampur. "Un conducteur de rickshaw l'a ramenée à la maison. (Elle) a été jetée devant notre maison. Mon enfant pouvait à peine se lever ou parler", a témoigné la mère de la victime citée par la chaîne NDTV. La jeune femme a succombé à ses blessures sur le trajet de l'hôpital. Les deux suspects auraient été arrêtés selon la police.
Ces deux viols collectifs ont révulsé l'opinion indienne. D'autant qu'ils s'ajoutent à une série de viols qui semblent avoir explosé de façon exponentielle depuis le début de l'épidémie de coronavirus, comme le précise le New York Times.
Selon le dernier rapport du Bureau national des registres de la criminalité (NCRB), l'Inde a enregistré 88 cas de viol chaque jour en 2019. Sur un total de 32 033 cas de viol signalés au cours de l'année, 11% faisaient partie de la communauté dalit, qui compte 200 millions de personnes.
"Les femmes des communautés dalits sont plus vulnérables. Elles subissent une énorme pression sociale en raison de leur caste et hésitent à signaler les cas de viol. Personne au poste de police ne les écoute dans la plupart des cas. Cette apathie de la police est principalement due au fait qu'elles sont issues de la caste inférieure", a déclaré à India Today Yogita Bhayana de People Against Rapes in India (PARI), une organisation de soutien aux survivantes de viol.