Joséphine Baker au Panthéon ? C’est la proposition originale faite par Régis Debray dans Le Monde mardi 17 décembre. « Cette sirène des rues pourrait bien nous aider à dégeler les urnes et les statues, à mettre un peu de turbulence et de soleil dans cette crypte froide et tristement guindée », écrit Régis Debray. L’écrivain met en avant le destin exceptionnel de Joséphine Baker, qui révolutionna la vie culturelle parisienne dans les années 20, s’engagea au service de la Résistance et adopta des enfants du monde entier. Retour sur la vie hors du commun de ce symbole d'une certaine libération féminine.
Influence sur la vie parisienne
Quand elle débarque, à Paris en 1925, âgée d’à peine 20 ans, Joséphine Baker bouscule profondément la vie culturelle parisienne, qui découvre avec elle les revues nègres, très répandues aux Etats-Unis. Seins nus, vêtue d'une simple ceinture de bananes, elle interprète au Théâtre des Champs Elysées « La Danse sauvage » sur un rythme de charleston. Sa couleur de peau, sa morphologie et sa manière de danser, en rupture avec les canons de l’époque font d’abord scandale avant de susciter un engouement général. Très rapidement, Joséphine Baker devient l’égérie de nombreux artistes cubistes tout en faisant découvrir au public parisien le jazz et les musiques afro-américaines. Elle entretient une liaison avec Georges Simenon, pose pour Picasso, monte sur scène avec un léopard et enregistre la célèbre chanson « J’ai deux amours », écrite par Vincent Scotto.
Engagement politique en France et aux Etats-Unis
Reconnaissante envers sa patrie d’adoption, Joséphine Baker devient un agent du contre-espionnage au service de la France dès le début de la Seconde Guerre mondiale. La légende veut qu’elle ait utilisé ses partitions musicales pour dissimuler des messages secrets. Après la victoire de l’Allemagne, elle continue son combat et s’engage dans les forces féminines de l’armée de l’air, avec lesquelles elle débarque à Marseille en octobre 1944. Ses bons et loyaux services envers la France seront récompensés par plusieurs distinctions honorifiques et le général de Gaulle lui remettra lui-même la Légion d’honneur.
Dans les années 60, Joséphine Baker, qui est originaire du Mississippi, un des états américain où la ségrégation est la plus dure, s’est également engagée en faveur des droits civiques des noir-américains. Elle participe ainsi en 1963 à la Marche vers Washington pour le travail et la liberté organisée par Martin Luther King.
La « tribu arc-en-ciel »
Désespérée de ne pouvoir avoir d’enfant, Joséphine Baker s’est constituée une famille hors du commun en adoptant 11 enfants à travers Le Monde entier. A la fin de sa vie elle se consacre entièrement à sa « tribu arc-en-ciel », comme elle l’appelle. Tout ce petit monde vit dans son château en Dordogne, aujourd’hui devenu un musée à sa mémoire. En 1969, alors qu’elle est pratiquement ruinée, la princesse Grace de Monaco, lui offre alors un logement à Roquebrune pour le reste de sa vie et l'invite à Monaco pour des spectacles de charité.
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