Corruption, gestion opaque, dessous de table pour l'attribution de compétitions... la FIFA est au coeur d'une tempête judiciaire, depuis le 27 mai dernier et l'arrestation, à Zurich, de hauts responsables de l'instance dirigeante du football mondial. Face au scandale, des voix s'élèvent au sein de la plus puissante des fédérations sportives. Parmi elles, celle de Tatjana Haenni, directrice adjointe de la FIFA en charge des compétitions féminines.
"Il est temps que les femmes soient davantage impliquées , que ce soit dans les domaines de la politique, des gouvernements ou des organisations sportives", a-t-elle déclaré en marge de la Coupe du monde de football féminin qui se déroule actuellement au Canada. Et la responsable de déplorer : "Le football semble faire partie des moins accessibles". Pour cause, il suffit de regarder l'organigramme de la FIFA pour comprendre la place famélique qu'occupent les femmes.
En effet, si l'instance se targue, dans son dernier rapport d'activité, de compter 41,5% de femmes parmi ses différentes divisions (seul le bureau du président compte plus de femmes que d'hommes, ndlr), le comité exécutif de la FIFA, l'organe exécutif et véritable lieu de gouvernance du football mondial ne compte qu'une seule femme élue sur 28 membres. Aujourd'hui, seule la Burundaise Lydia Nsekera a été élue au comité. Et si deux autres femmes y sont présentes, l'Australienne Moya Dodd et la représentante des îles Turques-et Caïques, Sonia Bien-Aime, ces dernières ont été cooptées et non élues...
Une sous-représentativité des femmes qui "pose clairement problème", comme l'expliquent à Terrafemina, Vikash Dhorasoo, Brieux Férot et Gautier Kertudo, membre du mouvement collectif et populaire TATANE, engagé pour un football durable et joyeux. "La FIFA est en charge du développement du football dans sa globalité et le football féminin devrait être davantage représenté. Les femmes ne jouent pas au foot que tous les 4 ans au mois de juin ! Toute l'année, elles doivent pouvoir participer au développement de leur sport", précisent-ils, avant d'ajouter : "Aujourd'hui en France, des femmes exercent des postes à hautes responsabilités dans le sport. Des personnes comme Nathalie Iannetta à l'Elysée ou Béatrice Barbusse au Centre National pour le Développement du Sport démontrent que les choses avancent. L'arrivée de Corinne Diacre au poste d'entraîneur de Clermont a également permis de faire évoluer les mentalités".
Et les membres de TATANE de préciser : "Le pouvoir ne se donne pas, il se prend". De pouvoir, il en sera justement question lors du prochain congrès extraordinaire électif de la FIFA, prévu pour fin 2015, début 2016, au terme duquel Sepp Blatter abandonnera son poste de président, à près de 80 ans, dont 17 passés à la tête du foot mondial. Lydia Nsekera pourrait bien incarner le renouveau de l'instance. A 48 ans, l'ex-présidente de la Fédération du Burundi, élue au Comité exécutif de la FIFA en 2013, a un profil intéressant pour succéder à Blatter. Par ailleurs, après la succession de scandales, voir une femme propulsée à la tête de la FIFA pourrait marquer une forte volonté de changement.
L'idée est même loin d'être saugrenue sur un plan purement comptable puisque Mme Nsekera pourrait éventuellement compter sur les 54 voix du continent africain, le mieux représenté à la FIFA. "Une candidature, de Lydia Nsekera ou d'une autre, avec des idées neuves et une réelle volonté de changer la FIFA serait bien évidemment un signal fort", déclare Gautier Kertudo, tout en mettant en garde contre une "candidature symbole" qui elle ne serait, selon lui, que "contre-productive".
"Le règne de Sepp Blatter a habitué l'opinion à l'idée d'une FIFA conservatrice sans réel impact sur le football. Aujourd'hui, ce temps-là a peut-être changé. Le renouvellement des pratiques peut certes passer par la candidature d'une femme mais se fera surtout avec un programme et une réelle volonté de redonner du sens à une gouvernance internationale du football."
Un nouvel élan notamment incarné par les quelque 30 millions de femmes licenciées d'un club de football à travers le monde. Le développement du football féminin et de ses valeurs "attirent de nouveaux pratiquants, de nouveaux partenaires et de nouveaux diffuseurs. La popularité actuelle du foot féminin est une bonne chose et le développement de clubs comme Lyon ou Paris et participe à la structuration de la discipline", concluent les membres de TATANE, qui souhaitent poursuivre leur démarche de développement d'un football joyeux et universel, notamment à travers l'école de foot mixte créée par le collectif.