Il y a quelques semaines, la photo d'une Américaine faisait le tour des réseaux sociaux. Mère de trois enfants, elle affichait sans complexe son corps métamorphosé par la grossesse dans un bikini. Son but : faire comprendre à tous qu'il ne faut pas avoir honte de son corps. Aujourd'hui, c'est un autre cliché du même genre qui fait le buzz sur Facebook. Sauf que cette fois-ci, il n'est pas question d'acceptation de son corps mais plutôt de la honte qui l'entoure.
Le vendredi 3 avril dernier, Macy Edgerly, une lycéenne de l'établissement Orangefield au Texas a été renvoyée chez elle à cause de sa tenue jugée inappropriée. Portait-elle une robe trop courte ? Un top trop décolleté ? Rien de tout ça. Comme beaucoup d'adolescentes, c'est vêtue d'une tunique et d'un legging que Macy était allée à l'école ce matin-là. Une tenue pas vraiment sexy donc, mais qui pourrait apparemment "distraire ses camarades masculins". Outrée par cette exclusion, la grande soeur de l'adolescente, Erica, a alors décidé de poster sur son compte Facebook un cliché de sa benjamine portant la tenue en question. Aujourd'hui, le post cumule quelques 85 600 partages et plus de 200 "likes".
Il faut dire qu'en plus de la photographie, Erica n'a pas hésité à dire ce qu'elle pense de toute cette mascarade. Pour elle, le renvoi de sa petite soeur est un symptôme direct de la culture du viol (également très présente sur les campus universitaires américains). Elle écrit : "Les gens se demandent pourquoi les femmes ne se sentent pas bien dans leur peau et leurs vêtements... C'est à cause de choses comme ça : quand on vous dit que vos tenues sont inappropriées, alors même que vous êtes habillée normalement. Au lieu de rejeter la faute sur les jeunes filles, le système éducatif devrait commencer à expliquer aux jeunes hommes que juger les femmes sur leurs vêtements et porter un regard dégradant sur elles contribuent à la culture du viol".
Comme elle l'ajoute, cette exclusion a aussi privé sa petite soeur d'une chose fondamentale : le droit à l'éducation. "Quand vous renvoyez quelqu'un de l'école à cause de sa tenue inappropriée, vous le privez aussi de son éducation. J'imagine que faire attention à ce que les garçons ne fassent face à aucune distraction (même quand il n'y en a aucune) est plus important que l'éducation des femmes. Quand les gens se rendront-ils compte qu'il faut prendre ce problème au sérieux ?"
Aux Etats-Unis, les éducateurs sont-ils en train de se transformer en police de la morale ? En effet, le cas de Macy Edgerly est loin d'être isolé. Comme elle, de nombreuses adolescentes ont été mises à la porte à cause de leurs tenues. En octobre dernier, Emily Schaeffer, 17 ans, avait ainsi été renvoyée de son lycée de Caroline du Nord car elle portait elle aussi un legging (ainsi qu'un manteau long et des grosses bottes). Deux lycées de l'Utah ont également été pointés du doigt. Le premier avait forcé 24 jeunes filles à quitter leur bal de rentrée car leurs tenues n'étaient pas jugées convenables. Le second s'est attaqué à Gabi Finlayson, 16 ans. Une fois encore, c'est sa robe de bal qui posait problème. La jeune fille avait été obligée de porter un manteau sur sa tenue tout au long de la soirée. Interrogée par Today.com en janvier dernier , elle confiait : " Je suis restée au bal car j'attendais cette soirée depuis longtemps. Mais je me suis sentie embarrassée et honteuse. C'était vraiment dur pour moi car cette soirée aurait dû être spéciale. Au lieu de ça, j'ai été blessée et j'ai eu l'impression de ne pas être assez bien ".
Mais l'histoire la plus choquante s'est déroulée dans les couloirs du lycée Oakleaf en Floride. En septembre 2014, trois jours seulement après la rentrée des classes, la jeune Miranda Larkin, 15 ans, avait été obligée de troquer sa jupe – jugée trop courte par une enseignante – contre un bas de jogging et un T-shirt fluo portant l'inscription : "Violation du code vestimentaire". Sa mère s'était alors emportée : "Avec ces histoires de code vestimentaire, les filles sont plus sexualisées que les garçons. Elles deviennent super sensibles à propos de leur propre sexualité. Elles partent le matin en se disant : 'je suis jolie aujourd'hui', et elles finissent la journée en se demandant si le problème vient d'elles : 'ma jupe est-elle trop courte ? Est-ce que j'en montre trop ?'"
En mars dernier, la youtubeuse féministe Laci Green évoquait le problème dans une vidéo baptisée "Dress code sexism". Comme la mère de Miranda Larkin, elle y explique que les codes vestimentaires appliqués dans certains lycées américains sont sexistes de base. Les jeunes filles sont visées de manière disproportionnées, elles sont sexualisées alors qu'elles sont encore mineures, et surtout, c'est elles qui sont blâmées si les garçons sont distraits par leurs tenues. Une fois encore, la culture du viol n'est jamais bien loin.
Mais que l'on se rassure, la longueur des jupes n'est pas le seul cheval de bataille des éducateurs. Récemment, plusieurs lycées étaient épinglés pour avoir photoshoppé les portraits de leurs étudiants. Adieu boutons, joues rondes et piercings... la perfection physique passe avant le diplôme.