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L'orgasme féminin dans les films américains ? C'est 2 minutes chrono
Publié le 22 février 2015 à 00:58
Par Sophie Bramly
Le cinéma américain peine à représenter avec justesse la jouissance féminine sur grand écran. Et Hollywood se fait le vecteur d'idées reçues sur l'orgasme.
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Le magazine Le Point faisait récemment un article sur l’éducation sexuelle dans les écoles primaires en Allemagne, où les enfants apprennent dans des centres spécialisés tout ce qui a trait à la sexualité. Là-bas, savoir utiliser un préservatif, la taille des organes génitaux, les positions sexuelles, le plaisir, la masturbation, et globalement la possibilité de parler, d’échanger avec quelqu’un de tout ce qu’il est impossible de demander à ses parents, permet aux écoliers de s’épanouir sans craintes. Au point que depuis quelque temps, certains parents s’insurgent et craignent que tout cela soit trop pour leur progéniture, qu’ils auraient « besoin d'amour, pas de sexe ! », faisant fi des poursuites judiciaires qu’ils risquent, car ces stages sont obligatoires. On parle d’extrémistes en tout genre.

Pendant ce temps-là, aux Etats-Unis, un site féministe profite de la sortie de « 50 Shades of Grey » pour s’étonner de la façon dont les films hollywoodiens ont du mal, en général, à représenter avec justesse la jouissance féminine sur grand écran. De façon générale, les scènes sont rapides et le plus souvent la femme ne jouit qu’au moment de la pénétration vaginale, ce qui sous-entend que c’est la seule vraie façon d’avoir des orgasmes. Or, pour l’Association de Psychologie Américaine, ce n’est le cas que de 8% des femmes. Le site joue avec les statistiques et démontre que dans ce cas, quelqu’un qui aurait vu 20 films dans l’année avec des scènes de pénétrations vaginales, n’aurait pu voir qu’un 1,6 orgasme féminin, le 0,6 correspondant à une simulation.



Ce serait donc le cinéma américain - mais le français est loin d’être en reste ! - qui serait pour l’essentiel responsable de la diffusion massive d’une idée totalement erronée : les femmes jouiraient en 2 minutes et n’auraient pas besoin de stimulations clitoridiennes.

Globalement, les hommes arrivent à la jouissance plus souvent que les femmes (80% pour l’un et 50% pour l’autre) et c’est le gap entre les deux qui influence la façon dont hommes et femmes interprètent leurs propres expériences. Les femmes, qui craignent fréquemment de ne pas être assez sexy ou désirables, se forcent par ailleurs à faire plus de bruit pour rassurer leur partenaire. Pour la psychologue et sexologue américaine Erica Marchand, le phénomène qui consiste à s’inquiéter sans cesse de la façon dont l’autre perçoit son/sa partenaire porte le nom de “spectatoring” (se mettre dans une position de spectateur), lequel est inhibiteur de plaisir.



S’il est effectivement souhaitable que le cinéma prenne le temps de montrer la jouissance féminine avec plus de finesse et de justesse, il n’est pas le seul problème. C’est tout le corps de la femme qui sans cesse est pris en otage. Ces dernières années, ce sont les services marketing d’un certain nombre d’industries qui ont bien compris qu’en appuyant là où cela peut faire mal aux femmes, il y a un juteux et profitable business à faire. Il a suffit d’une part d’utiliser un vocabulaire autrefois destiné aux fillettes (comme l’indéfendable « girly ») et l’usage massif de la couleur rose (qui se répand dans les univers féminins comme la lave du volcan), et d’autre part de complexer par des injonctions autant que faire ce peut (il faudrait tonifier le corps, le rendre imberbe, aplatir le ventre, arrondir les lèvres, augmenter la taille des seins…).

Lorsque les femmes sont infantilisées à ce point, on ne saurait s’étonner alors que les enfants, en Allemagne ou ailleurs, soient menacées de ne plus avoir le droit de d’accéder à des informations qui les aident à grandir. Le fait que pendant des siècles, ils aient appris en observant le monde animalier (et humain), qui ne leur est plus accessible, le fait que la parole soit libératrice, le fait que la femme épanouie et libre apporte tant aux hommes et à la société en général, s’efface devant toutes les peurs économiques de ce début de siècle. Comme si empêcher les uns ou les autres de grandir, de s’épanouir, était la garantie d’un monde stable et rassurant. L’Histoire n’a-t-elle pas montré maintes fois que la peur n’engendre que plus de peur, et que l’épanouissement de toute une société est le signe de sa bonne santé ? On a envie de rappeler les slogans de mai 68 : "Vivre sans temps mort et jouir sans entrave."

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