C'est une histoire qui pourrait être ubuesque si elle n'avait pas d'aussi terribles conséquences, et qui a fait réagir la secrétaire d'État à l'Égalité entre les femmes et les hommes. Il s'agit de l'histoire d'Aïda, défenestrée par son conjoint, qui est aujourd'hui paraplégique. Le Fond de garantie des victimes lui refuse une indemnisation.
Le Maine Libre raconte qu'en août 2013, au Mans, dans la Sarthe (ville de Marlène Schiappa), Aïda (prénom modifié), appelle la police alors que son conjoint est violent. Il a déjà agressé un ami. La police lui conseille alors de partir du domicile. Elle songe un instant à prendre le train pour rejoindre de la famille mais il est tard et le billet est trop cher. Elle appelle le 115 et envoie des messages à des amis sans succès.
Elle se décide finalement à rentrer dans l'appartement où se trouve son conjoint plutôt que de dormir dehors. Là, il lui crie dessus, la menace, l'insulte et jette des objets au sol, comme le raconte le Maine Libre. Il finit par défenestrer Aïda du deuxième étage. Quand la police revient, alertée par des voisins, elle est au pied de son immeuble, gravement blessée. Elle reste paraplégique et ne pourra plus jamais marcher.
En juin 2016, son conjoint est condamné à 15 ans de réclusion criminelle et la Cour d'Assise demande alors une indemnisation d'Aïda, la victime, à hauteur de 90 000 euros.
Les avocats d'Aïda font alors appel au Fond de garantie des victimes pour qu'il verse cet argent. Aïda en a besoin pour les aménagements que son handicap demande. Elle aura par exemple besoin d'acheter une voiture spécialisée ou de travaux dans son logement.
Le Fond de garantie des victimes lui refuse alors cette indemnisation. La raison : en retournant chez elle, elle a contribué à son propre préjudice en ayant un comportement à risque.
Les avocats d'Aïda saisissent la Commission d'indemnisation des victimes d'infractions qui confirme la décision du Fond de garantie en février 2018, comme le raconte l'AFP. Aïda, "victime entre guillemets" comme la qualifie son avocat Maître Jarry, ne reçoit alors qu'une indemnisation partielle de 67 500 euros.
Outrée par cette décision, la secrétaire d'État fait part de son indignation sur le réseau social Twitter.
Elle a également déclaré au Maine Libre jeudi 3 janvier que "considérer qu'une femme est responsable, même partiellement, même administrativement des violences qu'elle subit va à l'encontre de tout le travail de conviction que nous menons dans le cadre de la grande cause du quinquennat pour l'égalité femmes-hommes ; pour convaincre qu'une femme n'est jamais responsable des violences qu'elle subit !"
Si une Cour d'appel doit statuer sur la décision finale, la secrétaire d'État se dit prête à intervenir pour faire changer cette décision : "Si c'est avéré et dans ces termes, j'interviendrai personnellement auprès des institutions concernées pour que réparation soit faite dans la justice".