Passionnée de foot depuis son adolescence, Salma rêvait un jour de chausser des crampons à son tour. Malheureusement, au Soudan, si la pratique de ce sport n'est pas interdite, elle est plutôt mal vue par le gouvernement (le président Omar el-Béchir est issu du parti islamiste traditionaliste) mais aussi par sa population. Il n'existe d'ailleurs sur place ni club ni compétition de foot féminin. La seule autre femme à avoir été reconnue dans le monde du football soudanais, Mounira Ramadan, l'a été en tant qu'arbitre dans les années 1970.
"Le Soudan est une communauté de tribus et certaines de ces tribus pensent que le rôle de la femme est confiné à la maison", explique à l'AFP Salma al-Majidi, qui a suivi des études de managements et de comptabilité.
Salma al-Majidi a donc décidé de contourner le problème et de s'impliquer autrement dans le sport. Et puisqu'elle ne peut pas jouer, elle décide de coacher des équipes masculines. "Je suis devenue entraîneuse parce qu'il n'y a toujours pas de place pour le football féminin au Soudan", confie la jeune femme de 27 ans. "Au début, certains joueurs ne voulaient pas travailler avec moi parce que j'étais une femme. C'était vraiment étrange pour eux. Mais avec le temps, ils ont commencé à me respecter et à me féliciter pour mon boulot. C'était un grand défi", souligne-t-elle.
Pour se former, la jeune femme observe longuement son frère cadet jouer. Elle écoute attentivement les entraîneurs distribuer leurs conseils et instructions, puis en discute à la fin des matchs avec eux. Jusqu'à ce qu'un jour, l'un des coachs lui propose de l'assister. "Il a vu que j'avais un don pour l'entraînement... et m'a donné une chance de travailler avec lui."
Rapidement, Salma commence à entraîner les équipes de moins de 13 ans, celle des moins de 16 ans d'un club sur la rive ouest du Nil et enfin des clubs masculins de deuxième division soudanaise. Elle est donc aujourd'hui la première femme arabe reconnue par la FIFA à coacher une équipe masculine, ce qui fait d'elle une pionnière dans un sport qui domine la région. "Il y a des restrictions pour le football féminin, mais je suis déterminée à réussir", a déclaré la jeune coach, dont le rêve est d'entraîner un jour une équipe internationale. "Mon message aux hommes en général est de donner aux femmes la chance de faire ce qu'elles veulent."
Salma a été nommée parmi les "100 femmes les plus inspirantes de 2015" par la BBC. "Je suis heureuse d'être un modèle dans le monde du sport au Soudan. Où que j'aille, mes compatriotes me saluent et me félicitent", explique-t-elle à la FIFA. La coach a assurément ouvert la voie.