Qui contrôle la situation au lit ? Si le monde change et les femmes des générations X et Y sont plus entreprenantes que les femmes des générations précédentes, on ne change pas si facilement notre vocabulaire, notre culture et nos habitudes, lesquels continuent de véhiculer deux messages obsolètes : le premier est que l'acte de "faire l'amour" se résume à la pénétration (on continue, au 21e siècle, d'exclure le reste sous le nom de "préliminaires") et le second, qui nous intéresse plus particulièrement ici, est que si l'un est "pénétrant" et l'autre est "pénétré", c'est que le pénétrant est le seul à être actif, et a donc la pleine responsabilité de faire jouir la femme, à lui "donner" un orgasme. La responsabilité est lourde à porter pour l'homme (et souvent assez inhibante) et l'idée est incroyablement fausse, puisqu'on sait aujourd'hui que la femme doit aller chercher son orgasme. Le fait-elle pour autant ? Pas toujours. La preuve par la masturbation ...
Mais avant cela revenons un instant sur le versant biologique des organes sexuels. Les études répètent inlassablement que les femmes ne seraient que 30% à connaître les orgasmes vaginaux, continuant de dégrader l'orgasme clitoridien selon le principe que si l'homme a des orgasmes grâce à son pénis, la femme doit jouir par le lieu qui accueille le plus souvent celui-ci : le vagin. C'est pourtant une erreur biologique, puisqu'on sait qu'à la 12e semaine d'existence, se dessine sur le foetus la fente uro-génitale, qui deviendra soit un pénis, soit un clitoris (soit le tubercule génital se mue en clitoris, la fente de l'appendice se creusant pour laisser apparaître les lèvres, soit c'est le pénis qui se forme à partir du tubercule et plus tard les testicules apparaissent). Les deux organes sont semblables, mais le clitoris est en grande partie interne pour une raison biologique très simple : il n'a pas besoin d'être externe, puisqu'il n'a pas à transporter de semence, d'ADN vers un autre corps. La similitude des deux organes devrait impliquer une logique à ce que l'orgasme clitoridien soit prépondérant chez les femmes. Un jour, peut-être, mais là n'est pas l'essentiel de mon propos.
Une démonstration autour de la masturbation vaginale me semble particulèrement parlante, parce qu'elle exclut le pénis : que font les femmes qui se masturbent avec un vibromasseur ? Des efforts ! Car ce n'est pas l'objet vibrant seul qui porte la femme vers l'extase (à peu d'exceptions près : un modèle de vibromasseur clitoridien est tellement puissant, qu'il est possible de le poser sur le clitoris est d'avoir moins de trois minutes plus tard un orgasme généralement très puissant). Les grandes adeptes de la masturbation commencent par se caresser le corps et imaginer un fantasme qui les porte, d'autres se mettront face à un miroir, forme de réplique de la masturbation masculine où l'individu est excité à la vue de ses parties génitales. Puis, elles vont essayer de stimuler leurs zones érogènes préférées (seins, clitoris, point G, anus, etc.). Lorsque la femme souhaite une pénétration vaginale, elle bascule légèrement le bassin et fait des mouvements de bascule ou circulaires, comme elle peut faire avec un partenaire, mais à son rythme, avec une tendance naturelle à contracter son vagin autour du vibromasseur pour mieux profiter des effets de la vibration. Cette contraction est essentielle (et peut tout changer pour les 2 partenaires).
Pour Elisa Brune*, "c'est le vagin qui sait ce qui est bon. Il y a donc tout bénéfice à prendre l'initiative et à chercher la bonne position, le bon mouvement, le bon rythme." Pour elle, il ne faudrait laisser le partenaire prendre l'initiative avant de maîtriser totalement son plaisir, voire même recourir à des exercices du périnée, pour renforcer le muscle pubbo-coccygien, et en retour intensifier les orgasmes.
Chaque semaine, des nouvelles techniques ou des nouvelles positions circulent pour améliorer la sexualité des femmes, comme si le miracle continuait de venir de l'extérieur, de la force pénétrante, mais il n'y a qu'une seule façon de bien jouir : bien se connaître et agir sans réserve.
* in Elisa Brune, Labo Sexo, éditions Odile Jacob