Iris est une quadra comme les autres. Une mère de famille qui écoule des jours paisibles avec son mec. Par paisibles, comprenez : ronflants à mourir. Mais un jour, elle s'initie aux applis de rencontres. Et commence à enchaîner les "date", quitte à redécouvrir... Son propre corps. Et son plaisir !
Ca, c'est le pitch joliment dévergondé d'Iris et les hommes, la nouvelle comédie de Caroline Vignal à découvrir ce 3 janvier en salles. Une chronique érotique qui s'autorise à aborder frontalement le polyamour, l'adultère, la jouissance au féminin, sans chichi et avec beaucoup de facétie. La cinéaste y retrouve sa complice survoltée, Laure Calamy, trois ans après Antoinette dans les Cévennes, qui avait valu à l'actrice un César bien mérité. Paré de son pitch sexy et sulfureux, ce come back fait diablement envie.
Mais que vaut-il au juste ? On a testé pour vous...
On pourrait décocher mille et une boutades au sujet d'Iris et les hommes, en affirmant par exemple que le spectacle est... Réjouissant. Trop facile. Mais pas si éloigné de la vérité en fait. Car on est ressorti enthousiaste du visionnage de cette fable moderne qui se saisit des enjeux actuels de la sexualité avec insouciance mais sans inconscience. Nuance nécessaire.
Caroline Vignal et Laure Calamy, c'est un duo sororal qui fonctionne à bloc : l'une met en scène le corps et la nudité de sa star avec une infinie tendresse (comme peut le faire Rebecca Zlotowski lorsqu'elle filme Virginie Efira), et l'autre transcende le texte de la réalisatrice/scénariste avec son énergie légendaire. Dans la peau d'Iris, Laure Calamy est effectivement lumineuse, traduisant impeccablement le parcours initiatique et orgasmique de son alias à l'écran, de l'ennui à l'euphorie...
Parcours qui passe par des lectures bien senties, dévoilées au lit façon film de la Nouvelle Vague : La femme gelée d'Annie Ernaux (texte qui fait tellement sens ici), Réinventer l'amour de Mona Chollet... Sans oublier les autres petites réfs qui ponctuent l'oeuvre, telle la fameuse métaphore du thé et du consentement (celle-ci). Oui, ce n'est pas dans les farces beaufs de Christian Clavier qu'on trouverait pareil name dropping.
Le tout est déployé dans une ode, moins au plaisir, qu'au désir, envisagé sous toutes ses formes. Sans prises de tête ou diabolisation de l'adultère : comme une parenthèse enchantée, rythmée au son des orgasmes partagés.
Iris et les hommes, c'est cela, une comédie très charnelle, et feel good, qui se permet même quelques instants freestyle étonnants (notamment : l'interprétation par Laure Calamy de l'un des hits d'un certain rappeur), prend le pouls de l'expérience féminine à l'heure des applis de dating, et s'interroge, mine de rien, comme a pu le faire la documentariste féministe Ovidie : ça fait quoi au juste de "baiser après #MeToo" ?
Sous sa fausse légèreté, le film pose la question, et le fait avec un optimisme qui n'en est pas moins intime et politique. Car l'enthousiasme de ce témoignage d'une époque est aussi une forme d'engagement. Vignal croit en la possibilité d'une sexualité bienveillante, heureuse, joyeuse, décomplexée. Car non, plaisir et respect, ce n'est vraiment pas antinomique. Iris le démontre largement.
Et ça fait un bien fou. De quoi rappeler le titre de l'excellent essai de Sarah Barmak : Jouir, en quête de l'orgasme féminin...
Ou comment décoller vers 2024 en passant par le septième ciel.
Iris et les hommes, de Caroline Vignal
Avec Laure Calamy, Vincent Elbaz...
Sortie le 3 janvier 2024