Isabelle Joschke : Le peu de femme dans ce secteur s'explique par l'image que renvoie la voile. Elle est considérée comme un sport exclusivement réservé aux hommes en raison de l'engagement physique qu'elle exige. En effet, les médias et les acteurs du milieu en parlent comme d'une discipline masculine et très virile.
Par ailleurs, beaucoup de garçons rêvent dès l'enfance de devenir de grands navigateurs et de gagner des courses. Or, non seulement, cet esprit de compétition est rarement inculquée aux jeunes filles, mais ces dernières ont peu d'exemple auxquels s'identifier.
Enfin, la moyenne d'âge des navigateurs se situe entre 30 et 40 ans ; une décennie pendant laquelle les femmes essaient généralement de fonder une famille. Et si les hommes parviennent à concilier les deux, c'est tout de suite plus compliqué pour les femmes.
I. J. : Certes, la voile est un sport qui exige une bonne condition physique mais il ne faut pas pour autant le réduire aux manœuvres car il y a aussi une grande part de stratégie. D'ailleurs, pour pallier les difficultés, les femmes développent généralement de fortes capacités d'anticipation et d'adaptation. Elles seront deux fois plus pugnaces et stratégiques, ce qui suffit généralement à faire aussi bien que les concurrents masculins.
I. J. : Il y a beaucoup de choses à faire. Il faut tout d'abord faire évoluer les mentalités car, finalement, la voile est représentatif de nombreux autres secteurs d'activité : la sous-représentation des femmes s'explique par le fait qu'elles ne s'imaginent pas avoir accès à de telles carrières. Or, la course au large pourrait être une discipline totalement mixte, puisque les femmes qui s'y sont engagées réussissent aussi bien que les hommes. Ellen Mac Arthur a ainsi gagné deux fois la Route du rhum et terminé deuxième au « Vendée globe ». Quant à Florence Artaud, elle détient le record de la traversée de l'Atlantique.
Il me semble également essentiel de mener des actions auprès des jeunes filles et de faire intervenir des professionnels dans les établissements scolaires et les écoles de voile afin de créer un lien de partage et d échange entre les navigateurs et la relève.
>> Solitaire du Figaro : le bilan de mi-parcours d'Isabelle Joschke <<
I. J. : C'est une petite association que j'ai fondé avec une amie journaliste pour participer au changement de mentalité et promouvoir la mixité dans tous les métiers, à commencer par ceux de la navigation. Concrètement, nous intervenons auprès des jeunes pour leur montrer l'étendue des professions qui s'offrent à eux mais aussi pour leur prouver que certains métiers dits « masculins » peuvent être exercés par des femmes et vice-versa.
Nous menons également des actions pédagogiques. La prochaine consiste d'ailleurs en la mise en place d'un programme de découverte de la course au large avec une classe de lycéens. Nous les pousserons à avoir une réflexion sur la place des femmes dans la voile et les préparerons en vue de leur participation à une course.