Un parent se retrouve bien souvent confronté à une situation compliquée : comment expliquer simplement (et sans l'effrayer) une situation complexe à son enfant. Notamment quand celle-ci touche à des enjeux existentiels, internationaux ou tragiques. Parfois, tout cela à la fois. C'est ce qu'éprouvent bien des parents lorsque leurs enfants les interrogent sur la guerre en Ukraine, et les images auxquelles ils et elles pourraient être confronté·es depuis une semaine.
Un sujet difficile qui ne doit cependant pas faire place au silence, à l'évitement ou au mensonge. Aborder la guerre face à des enfants, c'est possible. Il suffit simplement de trouver la bonne attitude, poser les bons mots, valoriser la clarté et l'écoute mutuelle sans inquiéter.
Petits conseils d'expert·es.
Expliquer une situation aussi tragique que la guerre en Ukraine implique de valoriser une attitude authentique et empathique. Il ne faut pas exacerber l'anxiété de l'enfant sans pour autant esquiver ses interrogations. Cela suppose de se mettre à son niveau, tout en conservant un recul parental nécessaire et bienveillant.
Catherine Verdier, psychologue, psychothérapeute et fondatrice de Psyfamille, l'explique en ces termes au Huffington Post : "Autant que les mots, c'est la posture de l'adulte qui est très importante. L'attitude, la voix, le regard, ne pas éviter les questions. Le but est de rassurer, d'être calme, quel que soit l'âge".
Cette posture apaisée ne doit pas pour autant se transformer en mensonge. L'honnêteté parentale est importante quand il s'agit d'aborder des sujets graves, qu'ils touchent l'enfant de près ou de loin. Il s'agit alors de poser des mots sur la réalité très complexe de la situation, sans laisser transparaître vos propres incertitudes.
"Il vous faut reconnaître qu'il s'agit d'un événement grave, mais que de nombreux pays travaillent ensemble pour déterminer ce qu'il faut faire. Faites-lui cependant comprendre que sa vie quotidienne sera la même", analyse Jane Gilmour, psychologue clinicienne, au magazine Hello. Ce qui rejoint l'opinion de Catherine Verdier : "Il faut aussi remettre cette guerre-là où elle se trouve: en Ukraine et en Russie".
"Soyez honnête. En période d'incertitude, il n'est jamais plus important pour votre enfant d'avoir une relation solide, d'avoir confiance en vous. Si vous dites à votre enfant quelque chose qui n'est pas vrai, cela peut nuire à votre relation et à la stabilité qui la caractérise", développe encore Jane Gilmour. Ce sont donc bien des choses qui se jouent lors de ces conversations.
Si alarmer et angoisser est déconseillé, cela n'empêche cependant pas une certaine transparence durant cet échange. Ainsi Parker L. Huston, psychologue pédiatrique, recommande-t-il aux parents de partager leurs propres sentiments à propos de l'Ukraine de manière adéquate, "sans faire de sensationnalisme".
Au site de psychologie Very Well Mind, il suggère : "Essayez de ne pas dire que vous êtes terrifié·e, horrifié·e, dépassé·e, même si c'est ce que vous ressentez en ce moment. Au lieu de cela, dites par exemple : 'Je me sens très bouleversé·e en ce moment. Je m'inquiète vraiment pour les personnes concernées...'".
Idéal pour préciser un contexte sans pour autant trop y impliquer l'enfant. "Montrez de l'empathie pour les familles qui sont actuellement vulnérables et menacées", prescrit à l'unisson la psychologue clinicienne Jane Gilmour.
Face à ses enfants, rassurer est essentiel, mais informer importe tout autant. Même s'il n'est jamais évident d'adapter ses connaissances à l'âge de l'enfant. Là encore, c'est un numéro d'équilibriste qui se joue. "En fonction de leur âge, vous pouvez parler de l'histoire de chaque pays et donner un aperçu des raisons pour lesquelles ils sont en conflit", propose de son côté le psychologue pédiatrique Parker L. Huston.
"Les jeunes enfants ont besoin que leurs informations soient expliquées en termes simples. Utilisez une analogie identifiable (par exemple, 'si quelqu'un prend quelque chose qui ne lui appartient pas, ce n'est pas OK'). Le cerveau des ados est davantage fait pour découvrir des choses indépendamment (plutôt que d'être informé), alors dirigez-les vers des sources d'informations précises, puis prenez le temps d'en parler", complète Jane Gilmour.
En somme, la complexité de la guerre peut être abordée de façons adaptées. Au Huff Post, Catherine Verdier suggère quant à elle d'éviter un trop-plein de news, en informant "un peu au jour le jour s'ils ont de nombreuses interrogations, sans les submerger de détails sur le conflit".
A l'unisson, les psys s'accordent à dire que laisser les enfants s'exprimer est crucial au cours de cette communication. Cela permet aussi de faire savoir que l'on est là pour les écouter, s'ils le souhaitent. "Tous les enfants ne seront pas affectés de manière négative. Vous pouvez dire : 'Je sais que vous en avez entendu parler à la télé ou à l'école', afin de favoriser le dialogue", détaille le thérapeute familial Nick Koontz à Very Well Mind.
"En fonction de ce qu'ils disent, vous savez où cibler vos efforts en tant que parent. Ne soyez pas trop rapide pour corriger les informations erronées, permettez-leur de partager leur ressenti avant de vous lancer. Soyez prêt à écouter et à ne pas négliger ce qu'ils vous disent", poursuit l'expert.
Avant de parler, il faut s'interroger et savoir pourquoi ce dialogue a lieu. The Conversation en rappelle certaines raisons. Aider les enfants à gérer les émotions difficiles qui peuvent survenir, comprendre ce qu'ils ressentent et le rassurer, mais aussi lutter contre la désinformation, si les enfants et ados ont accès - notamment - aux photos et vidéos pas toujours sûres relayées sur les réseaux sociaux.
"Malheureusement, il y a eu une vague de désinformation qui s'observe sur des réseaux sociaux couramment utilisées par les plus jeunes, comme TikTok et Snapchat, et il est essentiel pour les parents et les éducateurs de tenir les enfants informés de l'invasion de l'Ukraine sur la base de sources fiables, et ce pour mieux leur permettre de poser des questions", insiste le média.