Depuis début 2014, près de 2000 femmes ont été enlevées par le groupe Boko Haram. Alors qu'on est toujours sans nouvelles des 200 lycéennes enlevées l'an dernier qui ont mobilisé la planète entière avec le mouvement "Brin g Back Our Girls", l'armée est parvenue à sortir plusieurs centaines de femmes et enfants des griffes des ravisseurs au cours des dernières semaines. Prises en charge par les autorités et les associations, certaines survivantes témoignent. D'autres, traumatisées par les sévices que les soldats de Boko Haram leur ont fait subir, se murent dans le mutisme.
La faim, la maladie, les violences quotidiennes... Les survivantes de Boko Haram racontent les terribles conditions de détention dans lesquelles elles ont vécu au cours des derniers mois. Certaines ont subi des pressions afin d'épouser des combattants de la secte. En effet, seul le mariage permettait aux islamistes de pouvoir violer les captives en toute impunité.
RFI a recueilli le témoignage d'une survivante, Habiba, qui a refusé d'épouser un membre de Boko Haram. "C'est quand tu refuses de les épouser que tu as des problèmes", explique-t-elle. "Ils te menottent et t'enferment, et ils te fouettent tous les jours. Ils te menacent avec des armes. Certaines n'ont plus supporté la souffrance et ont accepté le mariage." S'il est difficile de savoir, à ce stade, combien de femmes ont été violées par les soldats de la secte, des rumeurs ont circulé à propos de prisonnières revenues enceintes de leur captivité.
Comme beaucoup de femmes et d'enfants, Habiba a été emmenée dans l'est du pays, à Yola, où les autorités et les associations les prennent en charge. Des soins médicaux et des thérapies ont été mis en place pour soigner ces survivants qui ont vécu l'enfer pendant plusieurs mois. Mais certaines Nigérianes peinent à sortir de leur mutisme après avoir subi des violences et des sévices sexuels.
Toute la difficulté consiste à prendre en charge ces femmes traumatisées qui peinent à se livrer et ont parfois été victimes d'un lavage de cerveau pendant leur captivité. Interrogé par Le Monde, Christian Macouley Sabum, qui coordonne la prise en charge psychosociale des rescapés pour le compte du Fonds des Nations unies, raconte : "On leur répète que leur famille et tout ce qui n'est pas dans le cercle de Boko Haram n'est pas bon. Leurs imams convertissent même celles qui sont déjà musulmanes, parce qu'ils considèrent que seule leur version de l'islam est la bonne. "
Obligées de subir les questions de l'armée qui cherche à rassembler le plus d'informations au sujet de Boko Haram, certaines de ces survivantes supportent mal les conditions de prise en charge et ont même demandé à retourner dans la forêt, explique Christian Macouley Sabum.