Boire de l'alcool pendant la grossesse peut nuire à la santé de votre bébé. Cette inscription que l'on retrouve sur certaines affiches dans la salle d'attente du médecin a sûrement déjà été lue par la plupart d'entre des femmes. Mais jusqu'ici, aucune étude scientifique ne mesurait l'ampleur exacte des risques pour le foetus, ni sur la fréquence de l'alcoolisation foetale.
Pour la première fois, un rapport dévoilé mardi 4 septembre par l'agence gouvernementale Santé Publique France dresse un état des lieux chiffré de la consommation d'alcool des Françaises enceintes.
D'après l'étude, qui se concentre sur des données comprises entre 2006 et 2013, 3207 bébés nés sur le territoire français ont rencontré des difficultés de santé liées à la consommation d'alcool lorsqu'ils étaient dans le ventre de leur mère. Les régions avec les fréquences des codes les plus élevées sont La Réunion, la Haute-Normandie, la Champagne-Ardenne et le Nord-Pas-de-Calais.
Parmi ces nouveaux-nés, 452 d'entre eux souffraient de ce qu'on appelle dans le jargon médical le syndrome d'alcoolisation foetale (SAF). "Le SAF est la première cause de handicap mental non génétique à la naissance et d'inadaptation sociale de l'enfant et il est entièrement évitable", précise l'agence Santé Publique France.
Lorsqu'une femme enceinte consomme de l'alcool, la substance se transmet rapidement au foetus par le sang, ce qui peut entraîner de graves conséquences sur le système nerveux central du bébé, ainsi qu'un retard de croissance ou des malformations.
Ces risques sont cependant mal connus par les principales intéressées, comme le montre les données du baromètre santé 2017. Parmi les femmes interrogées, quatre sur dix ont déclaré ne pas avoir été informées des risques de la consommation d'alcool pendant leur grossesse. Une femme sur dix a par ailleurs déclaré avoir consommé de l'alcool de manière occasionnelle lorsqu'elle était enceinte.
Pour Catherine Hill, épidémiologiste à l'Institut Gustave-Roussy, ce manque d'information traduit un manque de prévention de la part des pouvoirs publics et une trop grande proximité du gouvernement avec les lobbies de l'alcool.
"Les industries de l'alcool proposent de participer à la prévention. Ce sont eux qui vont décider de la taille du logo des femmes enceintes, actuellement entre 4 et 6 millimètres sur les bouteilles. Ils proposent de les rendre deux fois plus grands, ce qui restera minuscule", a-t-elle dénoncé mardi soir au micro d'Europe 1.
"Des femmes enceintes boivent régulièrement parce qu'on ne leur a pas dit qu'il ne fallait pas boire, que le logo est invisible et que les messages de prévention sont non existants. C'est catastrophique", déplore la doctoresse.
Une enquête qualitative réalisée en 2017 par Santé Publique France à destination des professionnels de santé alertait déjà sur la méconnaissance des risques alcool-grossesse et sur le manque de légitimité et de crédibilité des messages délivrés par les pouvoirs publics à ce sujet.
La nouvelle étude de Santé Publique France a été réalisée dans le cadre de la Journée mondiale du SAF, qui se tiendra le 9 septembre. À cette occasion, l'agence sanitaire va lancer une campagne d'information intitulée : "Par précaution, zéro alcool pendant la grossesse".
La campagne se déploiera dans la presse et sur le web, à la fois auprès du grand public et des professionnels de santé pendant un mois.