Le jour, Pauline est formatrice de stage en récupération de points de permis. Tout sauf époustouflant. Mais la nuit, elle trouve une manière bien plus efficace pour réprimer tous ceux qui transgressent le code de la route : les déglinguer en voiture, cagoule sur la tête, gants de cuir aux mains... Tout simplement.
Ca, c'est le pitch de Bonne conduite : l'histoire d'une Catwoman du volant, justicière indépendante embrassant à bras ouverts la folie meurtrière. Cela pourrait être un drame, mais c'est une comédie déjantée, évoquant volontiers les farces "what the fuck" du cinéaste Quentin Dupieux (Rubber, Au poste !).
Et pour cause, ce film à rattraper en salles dès aujourd'hui est signé Jonathan Barré, réalisateur historique des sketches et longs-métrages fantasques du duo Palmashow, duo que l'on retrouve évidemment dans cette farce absurde.
Si les comiques jouent de leurs facéties habituelles en inspecteurs tour à tour lucides et paumés, ils se confrontent ici à une artiste encore plus drôle et dingue qu'eux : la géniale Laure Calamy...
Dans le rôle de Pauline, celle qui nous a bousculé le coeur et miné les nerfs l'an dernier dans le thriller social A plein temps (film coup de poing lauréat de deux César) retrouve l'énergie comique qui l'a fait connaître dans la série Dix pour cent. Protagoniste névrosée, riche de traumatismes qu'elle cherche à exorciser (en dégommant des chauffards, donc), mais aussi femme d'action sûre d'elle, déterminée, cette anti-héroïne malmène aussi bien la morale que les mecs (le plus souvent machos à souhait) qu'elle croise sur sa route.
Un personnage féminin fort et singulier donc, que Laure Calamy incarne en nous rappelant quelque chose : son brio quand il s'agit de malmener nos zygomatiques. Ici, c'est surtout sa sur-expressivité digne d'un héros de cartoon, sa propension à passer d'une expression outrée à une autre, qui engendre un rire contagieux.
Bon mais bien sûr, Bonne conduite, c'est aussi : un film d'action en Bretagne (oui), de longues séquences où les lunaires Grégoire Ludig et David Marsais, duo improbable de flics, dissertent sur les films catastrophes des années 90 (Volcano, Le pic de Dante) et la série Mindhunter, des seconds rôles en cascade (Thomas VDB)... Et surtout : un message moins bête qu'il n'y paraît et qui mine de rien confère d'autant plus d'intensité à notre vengeresse du bitume.
Car que raconte Bonne conduite au fond ?
Que les mecs, cible principale de notre protagoniste, constituent la majorité des chauffards, susceptibles de mettre des vies en danger. Cette comédie délirante nous suggère que les hommes sont majoritaires à adopter des comportements à risques. Ce qui est vrai. Huit morts sur dix sur la route sont des hommes, rappelaient encore récemment les chiffres accablants de la Sécurité routière. En outre, comme l'a étudié Sarah Hawkes, professeure de santé publique mondiale à l'University College de Londres, les hommes sont bien plus nombreux à adopter une consommation "excessive" de la boisson... Entre autres "comportements à risques".
Cela, Bonne conduite nous le murmure entre deux gags insensés. Pas si bête, pour une comédie qui tutoie l'absurde le plus carabiné...