"Nous ne nous tairons plus", préviennent-elles. Dans une tribune publiée dimanche 15 mai dans le Journal du Dimanche, 17 ex-ministres de la droite, de la gauche et du centre ont condamné le sexisme en politique et dénoncé les remarques et gestes déplacés qui font, encore en 2016, partie du quotidien des femmes.
Cinq ans après l'affaire DSK et une semaine après la révélation des soupçons de harcèlement sexuel qui pèsent sur le député écologiste Denis Baupin, les signataires de la tribune l'annoncent : "L'impunité, c'est fini". Transcendant les générations et les clivages politiques, Roselyne Bachelot, Cécile Duflot, Élisabeth Guigou, Aurélie Filippetti, Chantal Jouanno, Nathalie Kosciusko-Morizet, Valérie Pécresse ou encore Rama Yade annoncent que qu'elles dénonceront désormais "systématiquement toutes les remarques sexistes, les gestes déplacés, les comportements inappropriés".
"Nous nous sommes engagées en politique pour des raisons diverses, nous défendons des idées différentes, mais nous partageons la volonté que le sexisme n'ait pas sa place dans notre société. Ce fléau n'est pas propre à notre univers, loin de là, mais le monde politique a un devoir d'exemplarité [...] Nous avons été ministres, nous sommes ou avons été élues. Et comme toutes les femmes qui ont accédé à des milieux auparavant exclusivement masculins, nous avons eu à subir et à lutter contre le sexisme."
Les signataires de la tribune souhaitent aussi, par leur démarche, libérer la parole des victimes et faire changer la honte de camp. Pour un meilleur encadrement des femmes victimes de harcèlement et/ou d'agressions sexuelles, elles proposent plusieurs mesures juridiques qui prendront davantage en considération leur témoignage et leur permettra de porter plainte au-delà des délais de prescription jusqu'ici appliqués.
"Peu de femmes portent plainte et très peu de plaintes débouchent sur des condamnations. Plusieurs pistes doivent être étudiées : allongement des délais de prescription en matière d'agression sexuelle ; possibilité pour les associations compétentes de porter plainte en lieu et place des victimes ; fin de la possibilité de correctionnaliser un viol [...]."
Cécile Duflot sifflée à l'Assemblée pour avoir osé porter une robe, Najat Vallaud-Belkacem cible d'une chronique libidineuse dans Le Point, Véronique Massonneau comparée à une poule par un député aviné, Nicolas Sarkozy qui demande à Ségolène Royal de "se calmer" pendant un débat de l'entre-deux tours en 2007,Nathalie Kosciusko-Morizet interrogée sur son récent changement de coupe de cheveux et bien évidemment les récentes accusations de harcèlement visant Denis Baupin... Autant de manifestations sexistes prouvant que le monde politique est soumis aux mêmes schémas machistes que dans les autres sphères de la société.
Une énième incompréhension et maladresse de la part de l'ancienne présidente du Parti chrétien démocrate qui extrapole en jugeant que la tribune s'adresse à l'ensemble des hommes politiques, tous considérés comme des "obsédés".
Invitée de l'émission "Les Grandes Gueules" sur RMC ce lundi matin, Christine Boutin s'est justifiée en affirmant qu'il "y a des femmes avec lesquelles on peut aller plus loin et d'autres femmes avec lesquelles on ne peut pas aller plus loin" même si elle affirme elle aussi avoir déjà été la cible de "propos machistes insupportables".
Et d'invoquer le "puritanisme" des politiques envers la "gauloiserie" typiquement française. " Moi personnellement, j'aime bien la gauloiserie. Je trouve que le problème du harcèlement, c'est de savoir quelle est la limite. La limite, c'est aux femmes ou aux hommes de dire 'ça suffit'. [...] Je ne veux pas qu'on tombe dans le puritanisme. Je pense que la gauloiserie fait partie de l'identité française. Rigolote mais quand même bien là. Ça suffit."
Nous sommes sûres que les femmes qui n'ont pas osé dire "ça suffit" parce qu'elles avaient peur pour leur poste ou par crainte de ne pas être écoutées apprécieront.