L'initiative était pourtant belle et inédite. Jeudi 21 juin, 28 ministres du travail européens se sont réunis à Luxembourg afin d'examiner la directive de la Commission européenne visant à améliorer le congé parental.
Ce projet de l'UE proposait notamment d'indemniser au niveau européen un congé de quatre mois pour chaque parent, fractionnable et pouvant être pris jusqu'aux 12 ans de l'enfant, afin d'inciter davantage de pères à y recourir.
La directive recommandait d'aligner l'indeminsation du congé parental à celui du congé maladie. Actuellement rémunéré à hauteur de 396 euros mensuels, le remboursement de ce congé parental en France aurait par exemple pu s'élever à 50% du salaire pour le travailleur concerné.
Un projet ambitieux, que 13 pays de l'UE (dont la France, l'Italie et l'Allemangne) ont cependant revu à la baisse. Les ministres ont botté en touche, jugeant ces mesures trop coûteuses. Ils ont donc décidé de réduire la période de remboursement de congé parental à 1 mois et demi, avec une "rémunération adéquate", mais sans donner plus de détails.
Le Parlement européen doit se pencher à son tour le 11 juillet sur les propositions de l'exécutif européen lors d'une réunion de la commission Emploi.
Ce rétropédalage a fortement été influencé par la France. En effet, Emmanuel Macron s'était déjà prononcé sur la question le 17 avril dernier, lors d'une séance au Parlement européen à Strasbourg. Le président de la République avait estimé que la France figure parmi les pays les mieux lotis de l'UE et qu'augmenter la durée et l'indemnisation du congé parental représenterait un investissement financier trop important.
"Les congés parentaux payés au niveau de l'indemnité maladie journalière, c'est une belle idée qui peut coûter très cher et finir par être insoutenable", avait-il déclaré.
La ministre du Travail française Muriel Pénicaud soutient également cette décision. "On ne peut pas dire que c'est un recul (...) la France, c'est un des pays qui a choisi un congé parental le plus long. On peut aller jusqu'à trois ans, dont un an indemnisé. Dans la plupart des pays, le congé parental et surtout l'indemnisation est beaucoup plus courte", estime-t-elle.
Cette décision est largement décriée du côté des associations familiales et des syndicats, qui parlent ni plus ni moins de recul. "Nous regrettons que certains éléments (du projet de directive de la Commission, ndlr) tels que le paiement du congé parental au même niveau que celui de l'indemnité maladie aient été atténués", a réagi la Confédération européenne des syndicats (CES), dans un communiqué.
Actuellement en France, le congé parental (pour un enfant) est de six mois maximum pour un seul parent et d'un an si les deux parents en bénéficient. Quant au congé paternité, sa durée est fixée à 11 jours calendaires consécutifs, contre 10 semaines après l'accouchement pour le congé maternité. L'écart entre les droits du père et de la mère demeure donc très important, ce qui constitue un frein à la carrière des femmes qui se consacrent davantage à l'éducation de leurs enfants que les hommes.
Interrogée par Terrafemina, la Secrétaire d'État chargée de l'Égalité entre les femmes et les hommes Marlène Schiappa avait néanmoins éludé le sujet : "J'aimerais que l'on m'explique en quoi c'est une avancée pour les femmes alors qu'il s'agit de 4 mois de congés parentaux renforcés qui seront pris majoritairement par les femmes et pas par les hommes."
Emmanuel Macron a pourtant annoncé à plusieurs reprises qu'il ferait de l'égalité hommes-femmes une grande cause nationale de son quinquennat. Mais il faut croire que ce n'est pas pour tout de suite.