Le sourire aux lèvres, les mains dans les poches, et un air de défi dans les yeux. Samedi 8 avril, alors que le groupe d'extrême droite English Defence Leage (EDL) organisait une manifestation "contre l'islamisation de l'Angleterre" à Birmingham, une jeune femme s'est dressée contre Ian Crossland, le chef de file de cette formation. Immortalisé par le photographe Joe Giddens, le cliché a rapidement fait le tour des réseaux sociaux. Partagé en masse outre-Manche, il a ensuite atteint le reste de l'Europe ainsi que les États-Unis. L'une des premières personnes à l'avoir posté sur Twitter est Jessica Rose Phillips, députée du parti travailliste à Birmingham. "Qui a l'air d'avoir le pouvoir ici : la vraie habitante de Birmingham à gauche ou l'EDL qui a migré dans notre ville une journée mais n'a pas réussi à rassembler ?", s'est demandée la femme politique, faisant référence au peu de personnes présentes sur place. Seule une cinquantaine de membres de l'EDL s'étaient en effet rassemblés.
Pourquoi le groupuscule d'extrême droite avait-il choisi de manifester dans la deuxième ville britannique ? Plus de trois semaines après l'attentat de Londres qui a tué cinq personnes, c'est à Birmingham que huit personnes ont été arrêtées dans le cadre de l'enquête. Néanmoins, comme le révèle The Independent, "la démonstration a été accueillie par de l'irritation et de la perplexité de la part des habitants de la ville". Les élus locaux avaient tous condamné la manifestation, et de nombreux résidents étaient venus défier l'EDL. La jeune femme immortalisée par Joe Giddens faisait partie de ces manifestants. Si elle n'a toujours pas été identifiée, sa nonchalance et son amusement face au visage boursouflé de rage d'Ian Crossland a fait d'elle l'héroïne du weekend. A elle seule, la manifestante semble symboliser la réaction générale des habitants de Birmingham. Plus globalement, sa posture incarne aussi le ras de bol de nombreux Européens et d'Américains face à la montée du racisme et des extrêmes.
Tandis que l'English Defence Leage tentait de rassembler la foule dans la rue, la mosquée de Birmingham proposait une "tea party". Un événement ouvert à tous et organisé pour contrer la manifestation et son message haineux. Interrogé par The Independent, Muhammad Afzal, le président de la mosquée, a expliqué clairement : "Nous avons organisé cet événement pour montrer à l'EDL que Birmingham est une ville paisible et que nous sommes tous unis peu importe notre couleur de peau, notre race ou notre religion". De son côté, Liam Byrne, député local du parti travailliste, a ajouté : "Voilà comment nous protestons : en célébrant le miracle tranquille d'une vie normale et les choses que nous aimons le plus dans notre ville et notre pays. Nous réunir, partager une part de gâteau et une tasse de thé, c'est le message le plus puissant que nous pouvons envoyer à ceux qui tentent de nous diviser". Pari réussi puisque 300 personnes se sont déplacées pour savourer un thé en bonne compagnie quand l'EDL réunissait seulement une cinquantaine de manifestants.