Docteur Arnaud Cocaul : Même si l’alimentation des Français est très variable selon l’âge, l’origine et le milieu socio-culturel, on peut considérer que notre alimentation reste globalement encore trop riche en gras, sucre et sel. L’évolution de nos modes de vie est une des explications : l’offre alimentaire est à la fois abondante et attrayante, nous recherchons des produits à satisfaction immédiate qui sont généralement plus salés, plus riches en graisses et en sucre, notre alimentation tend à se déstructurer : dans notre jargon, nous parlons d’alimentation « zapping », « sans fin, ni faim ». Les quantités consommées évoluent elles aussi : les portions dans les assiettes sont plus importantes et ne tiennent pas suffisamment compte de l’âge. Et en parallèle, nous ne nous dépensons pas suffisamment…
A.C. : Les conséquences sont en premier lieu, pondérales (surpoids, obésité). Au-delà des problèmes physiques (notamment articulaires), une prise de poids a forcément un impact sur le bien-être psychologique de la personne, et peut l’amener à une alimentation refuge, où manger va être synonyme de réconfort. La face cachée de l'iceberg, ce sont notamment les maladies métaboliques, les maladies cardiovasculaires, les cancers.
A.C. : L’idée n’est pas de stigmatiser tel ou tel produit, ni à l’inverse d’idéaliser des aliments. Mes patients me citent souvent l’huile d’olive comme un aliment vertueux. Il est vrai que l’huile d’olive est source d’acides gras essentiels, c’est néanmoins une matière grasse, qu’il faut consommer sans excès.
Même si nous avons conscience des aliments qui sont susceptibles de « poser problème », notre déficit de préparation ou de culture culinaire peut nous conduire à privilégier des préparations plus grasses, plus salées ou sucrées plutôt qu’un produit que nous aurions stigmatisé de prime abord en raison d’idées préconçues.
Plutôt que de bannir des aliments, il s’agit davantage d’adapter la taille des portions, de limiter les fréquences de consommation et d’apprendre à faire la cuisine, à agrémenter les plats... pour se constituer les bases culinaires nécessaires à une alimentation saine.
A.C. : Naturellement, les produits qui ont été retravaillés pour réduire leurs teneurs en sucre, sel et graisses sont une alternative intéressante. Ils aident de façon simple à consommer moins gras, moins sucré, moins salé. Il faut cependant faire attention à ne pas en consommer plus car l’effet escompté serait inversé.
Les femmes travaillent plus, les jeunes sont plus autonomes, les populations globalement moins disponibles… Nous recherchons donc des produits qui font gagner du temps, se cuisinent sans beaucoup d’équipements, de place ou de savoir-faire, qui restent plusieurs semaines dans nos frigos sans se détériorer… Si une vigilance s’exerce sur la composition nutritionnelle de ces produits, il faut la saluer, car cela va dans le bon sens.
A.C. : Je pense qu’il faut avant tout revenir aux principes de base, à savoir : veiller à ne pas sauter de repas, manger à heure fixe, prendre ses repas assis, dans une ambiance calme et détendue.
Au moment des courses, aidez-vous des étiquettes pour privilégier les produits qui présentent le moins de sucre, de gras et de sel.
Je conseille aussi à mes patients de ne jamais faire leurs courses à jeun pour éviter les achats « maladroits » qui ne correspondent pas forcément à leurs besoins quotidiens.
Une autre façon de limiter le sucre, le sel et les matières grasses, est de cuisiner à la maison et d’utiliser les épices, faire des mélanges : des pâtes cuisinées avec de l’ail, du basilic frais et une compotée de tomates seront moins grasses et toutes aussi savoureuses, que des pâtes au beurre.
Les cuissons peuvent également vous aider à limiter les ajouts notamment de matières grasses et sel : court-bouillon, vapeur, wok, four, plancha…
Arnaud Cocaul