Vous lui avez acheté des cahiers de vacances, mais vous craignez que ces révisions d'été ne se transforment en guéguerre quotidienne ? Du coup, quelles sont les astuces pour parvenir à faire potasser un enfant en vacances sans qu'il se braque ? Pour Héloïse Pierre, co-fondatrice de Déclic et des Trucs, les enfants ont besoin de réviser le programme scolaire étudié pendant l'année écoulée durant les grandes vacances afin de conserver leurs acquis et même de les enrichir. Et, selon cette experte (dont le boulot consiste à faire aimer les mathématiques aux enfants), les révisions pourraient même se faire dans la joie et la bonne humeur, pourvu que les parents disposent des bons outils. Elle nous livre les clés pour des petites révisions fun et pacifiées.
Héloïse Pierre : Il est important en effet de les maintenir dans un processus d'apprentissage. En revanche, les faire réviser au sens scolaire du terme, non. Ce n'est pas approprié aux vacances. L'idée est de faire un lien avec ce qu'ils ont appris tout au long de l'année d'une manière un peu différente en s'appuyant sur le nouvel environnement qui les entoure. Par exemple, à la plage, le simple fait de construire un château de sable avec eux peut être bénéfique à leur apprentissage. On peut par exemple essayer de leur faire comprendre les bases de la géométrie en leur faisant construire un château symétrique, puis passer des maths au français en leur demandant de nous raconter une histoire autour de ce château de sable "mathématique" incluant une introduction, un développement et une conclusion. Un moyen détourné de faire bûcher le français et les maths à travers une activité de plage 100 % ludique.
H.P : Oui, quel que soit son niveau, chaque enfant a besoin de continuer à être stimulé pendant les grandes vacances. Un enfant doué à l'école aura certainement envie d'aller plus loin, alors il vaut mieux continuer à essayer d'étancher cette soif d'apprendre, de lui en donner encore plus afin de lui permettre de s'enrichir d'avantage. Et s'il a de bonnes notes dans toutes les matières, peut-être choisir celle qui lui plaît le plus.
H.P : Toutes les études montrent que lorsqu'un enfant éprouve des difficultés scolaires, c'est souvent que le système éducatif proposé à l'école n'est pas forcément adapté à sa manière d'apprendre. Les vacances constituent justement le moment idéal pour tenter de débloquer tout ça et lui permettre de retrouver confiance en lui faisant travailler les matières où il a l'impression de ne pas y arriver. L'enfant a peut-être une mémoire plus visuelle et, à l'école, les instituteurs n'ont pas forcément le temps de s'adapter à lui. En vacances, on a beaucoup plus de temps disponible à consacrer à nos enfants, il suffit de le mettre à profit en se servant du cadre (mer, montagne, etc.) pour leur faire proposer une nouvelle manière d'apprendre.
H.P : A partir du moment où ce n'est pas de la révision au sens propre, il ne faut donc pas s'astreindre à un programme particulier. L'important est de se montrer à l'écoute de l'enfant. Lorsque l'on se trouve dans un schéma propice à la révision et à l'apprentissage, il faut y aller. Lui imposer des devoirs de vacances sur un cahier, quotidiennement, ça ne me semble pas du tout être la solution. Il faut savoir que seuls 25% des enfants finissent leurs cahiers de vacances et les études de l'IREDU (Institut de recherches pour l'éducation) montrent qu'un cahier de vacances non fini n'a absolument aucun effet sur les résultats scolaires des enfants. Il vaut donc mieux lui faire apprendre des choses et le stimuler autrement, au travers d'activités qui lui plaisent, et il sera au contraire ravi. Un enfant ne demande d'ailleurs qu'à s'enrichir. Ce sont nous, parents, qui avons tendance à les freiner en pensant qu'il ne faut pas trop les faire travailler et les ennuyer en vacances. Je vois ça dans nos ateliers de mathématiques : ils adorent ça et veulent réviser alors que l'on fait des maths. Donc, c'est possible !
H.P : Il y a entre 4 et 5 millions de cahiers de vacances qui sont vendus chaque été. Soit quasiment un pour chaque petit Français. Mais on a du mal à avoir les chiffres exacts car il y a des parents qui en achètent deux ou trois pour chaque enfant, ce qui fausse un peu les statistiques.
H.P : Il y a des enfants qui adorent les cahiers de vacances. Alors, si celui-ci est bien fait, on peut très bien les laisser travailler seuls, s'ils en ont envie. Mais, le but du jeu n'est absolument pas de crisper l'enfant pendant les vacances, ce qui risquerait au contraire de le bloquer pour de bon. Donc, si l'on voit qu'il n'en n'a pas du tout envie et qu'il le rejette en bloc, il faut changer de cahier de vacances et lui en proposer un plus ludique afin de rendre l'apprentissage plus sympa.
H.P : Certains parents estiment qu'il faut deux mois à leur enfant de pleines vacances pour se reposer, mais c'est faux. Les enfants ont vraiment une soif d'apprendre. Alors, bien sûr, ils ont besoin de changer d'environnement, de passer du temps en famille, mais au niveau de la stimulation intellectuelle, ils n'ont pas besoin de vacances. Il faut au contraire continuer à assouvir leur soif d'apprendre. Je pense que c'est plus une question de contexte propice que de "période". Si l'on est en voiture, par exemple, et que l'enfant est fatigué, ça ne sert à rien de lui imposer deux heures de révisions. Par contre, lors d'une promenade, on peut en profiter pour ramasser des bâtons pour monter une cabane et le sensibiliser aux maths, l'air de rien : "Sais-tu combien de cubes et d'arêtes il va nous falloir pour construire cette cabane ?". Une manière accessible et différente d'aborder les mathématiques en les intégrant à la vie de tous les jours.
H.P : Chez Déclic et des Trucs, nous sommes spécialisés dans les mathématiques. On a créé un cahier de défis proposant des activités à faire en vacances, que ce soit à la mer, à la montagne ou même à la maison. Ce sont des astuces ludiques permettant d'utiliser l'environnement comme base d'apprentissage pour faire réviser ce qu'ils ont appris durant l'année scolaire sans passer par la case du cahier de vacances traditionnel.
Le plus important, en vacances, c'est évidemment de s'amuser, c'est même essentiel ! On se trouve dans un cadre inédit qui nous permet de découvrir plein de choses mais qui ne se prête pas forcément au remplissage d'un cahier, assis à une table, comme ils le font en tant qu'élèves durant le reste de l'année. Le mieux est donc de leur enseigner des choses de manière légère tout en les laissant s'éclater afin que ces petites révisions n'entachent en rien le bonheur des vacances.