Pour finir l'année 2018 sur une note positive, revenons sur les profils de ces hommes qui ont fait preuve de féminisme cette année, et qui ont été nos alliés. On ne leur donnera pas de cookie, mais ils peuvent montrer l'exemple pour dire au plus grand nombre qu'on peut être un homme féministe.
Stephen Curry, le désormais mythique joueur de basket des Warriors de Golden States, en Californie, est père de deux filles et d'un petit garçon. Il s'alarme du fait que son fils naisse avec des avantages par rapport à ses filles : "Comment, en tant que parent, pourrais-je me sentir à l'aise avec ça ?"
Alors dans une lettre parue sur le site The Players Tribune, il écrit un véritable plaidoyer pour une éducation féministe. Pour lui, les filles grandissent avec une conscience aiguë des inégalités qui les touchent : "C'est parce que c'est encore si profondément enraciné en elles, même en 2018, que l'inégalité n'est qu'une chose à laquelle il faut s'attendre."
Pour lui, assez parlé, il faut passer à la pratique : "Pour être un véritable défenseur de l'égalité des femmes, il ne suffit plus d'en apprendre davantage à ce sujet. Vous devez agir. On est en 2018 : l'école est finie. Il est temps de passer à l'acte."
Il souhaite une nouvelle génération de filles et de garçons plus sensibilisé·es à l'égalité "Je veux que nos filles grandissent en sachant qu'il n'y a pas de limites à leur avenir, un point c'est tout. Je veux qu'elles grandissent dans un monde où leur sexe ne détermine pas ce qu'elles devraient penser ou être, ou faire.
Et je veux qu'elles grandissent en estimant qu'elles peuvent rêver grand et s'efforcer d'avoir une carrière où elles seront traitées équitablement. Et bien sûr : payées à parts égales."
Leo Varadkar
Âgé de seulement de 39 ans, Leo Varadkar est Premier ministre de la République d'Irlande depuis juin 2017. Dès la formation de son gouvernement, il charge son ministre de la santé Simon Harris d'organiser un referendum constitutionnel sur l'interruption volontaire de grossesse.
Affichant son soutien clair au "oui" lors du référendum organisé le 25 mai 2018, il a permis de changer la vie des Irlandaises qui jusque là devaient se rendre en Grande-Bretagne où l'avortement est lui autorisé depuis 1967. Des voyages coûteux seulement réservés à celles qui en avaient les moyens.
Elles pourront désormais avorter en toute sécurité dans leur pays : la loi mettant en place l'IVG a été votée le 13 décembre. Leo Varadkar a également lancé un appel aux femmes d'Irlande du Nord en leur permettant de venir avorter en Irlande, l'IVG étant toujours interdite de leur côté de la frontière.
A l'issu du référendum du 25 mai, il a déclaré : "Ce que nous avons vu aujourd'hui est le point culminant d'une révolution tranquille qui a eu lieu en Irlande ".
Leo Varadkar fait souffler un vent frais sur une Irlande catholique et conservatrice, il est aussi le premier Premier ministre métis à faire son coming-out.
Benjamin Biolay
Le 26 novembre disparaissait le cinéaste Bertolucci, le réalisateur d'Un dernier Tango à Paris avec l'actrice Maria Schneider et Marlon Brando. Dans le concert de rétrospectives sur l'oeuvre de Bertolucci, certains et certaines ont tenu à rappeler l'agression sexuelle dont Maria Schneider a été la victime lors du tournage de ce film.
Pour capter l'effet de surprise, il n'avait pas hésité à demander à Marlon Brandon de sodomiser Maria Schneider, sans que celle-ci n'en soit tenu au courant avant.
Benjamin Biolay avait alors tweeté la photo de l'actrice Maria Schneider avec ce texte : "Cher Instagram, sois un peu cohérent. Bertolucci c'est aussi le viol atroce et indélébile subi par la merveilleuse Maria Schneider durant le tournage du dernier tango. C'est bien gentil de se peindre un point sur la main. Ça l'est moins 48 heures après de faire l'apologie d'un chantre des violences faites aux femmes."
Nous l'avions rencontré en mars à l'occasion de la sortie du tome 2 de son livre La symphonie du hasard. Douglas Kennedy écrit beaucoup avec des points de vue de femmes dans ses livres.
A l'occasion de cette rencontre, il avait réaffirmé son engagement féministe : "Je suis hyper féministe, en effet. Peut-être parce que ma mère était une femme très intelligente mais toujours anxieuse, très frustrée aussi. Un peu comme la mère d'Alice à la différence que son personnage change et évolue, contrairement à ma mère qui n'a pas connu le succès.
Pour moi, la liberté individuelle est primordiale et je me méfie de la notion de compromis au sein du couple. Une femme ne doit pas se laisser contrôler par un homme et vice-versa. J'ai d'ailleurs toujours été avec des femmes très indépendantes et ambitieuses, qui ont construit une vraie carrière."
Il ajoutait avoir vu le sexisme lors de ses études et dans le reste de sa vie : "Je ne comprends pas que certains hommes puissent mettre une main aux fesses de femmes, comme ça, sans leur consentement. Je suis un homme et jamais je n'aurais de telles idées.
Il est plus que temps que l'on dise 'non et non' à tout ça. Je pense notamment à ma fille Amalia qui est actrice. Dans le milieu du cinéma, encore beaucoup d'hommes promettent un rôle si les femmes couchent avec eux. Il faut que ça s'arrête."
Si le Britannique est champion de tennis, il est aussi un champion du féminisme. En 2015, alors qu'il avait annoncé avoir choisi la championne française Amélie Mauresmo comme entraîneuse, il avait déclaré : "Je suis pour l'égalité en général et si c'est cela être féministe, alors oui, je le suis"
En 2017, il perd à Wimbledon. Un journaliste lui pose une question et parle de Sam Querrey comme "seul joueur de tennis américain à avoir atteint une demi-finale d'un tournoi majeur depuis 2009". Il est immédiatement repris par Andy Murray : "joueur masculin". Serena Williams a gagné sept fois Wimbledon entre 2002 et 2016.
Cette année sur Instagram, il a réagi à la demande ridicule de twerker de Martin Solveig à la championne Ada Hegerberg qui venait de gagner le ballon d'or : "Encore un exemple du sexisme ridicule qui existe toujours dans le milieu du sport".
Il avait également ajouté : "Pourquoi les femmes doivent-elles encore endurer cette merde ? Quelles questions ont-ils posé à Mbappé et Modric ? J'imagine qu'elles avaient un rapport avec le football. Et à toutes les personne qui pensent que la réaction des gens est excessive et que c'était juste une blague... Ça ne l'était pas. J'ai été immergé dans le milieu du sport toute ma vie et le niveau de sexisme y est irréel."
En mai, l'acteur de Sherlock Holmes Benedict Cumberbatch a déclaré à l'hebdomadaire culturel britannique Radio Times : "L'égalité salariale et [obtenir] une place à la même table [que les hommes] sont les principes centraux du féminisme"
Dans le même entretien, il lançait un appel à tout·es les professionnel·les du monde du cinéma : "Regardez vos pourcentages. Demandez combien les femmes sont payées et dites : 'Si elle ne sont pas payées la même chose que les hommes, je ne le fais pas'"
Il compte se servir de sa société de production SunnyMarch pour arriver à ses fins : "Même si cela repose sur mon nom pour séduire les investisseurs, ensuite on peut utiliser ces fonds pour développer les projets féminins. Les femmes composent la moitié de notre audience !"
Guillaume du compte Instagram "Tu bandes"
Derrière ce compte qui déconstruit la masculinité toxique on retrouve un homme : Guillaume, 25 ans. Il veut défaire les codes qui enferment les hommes dans un carcan. Ses 62 000 abonnés lui envoient leurs interrogations et leurs préoccupations d'hommes.
Comme cet abonné qui témoigne : "Ma plus grande peur d'homme réside dans ma perte d'érection " ou celui-ci : "La pression subie sur la taille du pénis est horrible. Il y a cette image du 'vrai mec' qui en a forcément une grosse ".
Les discussions autour des rôles genrés dans la société sont primordiales pour arriver à l'égalité et que chacun et chacune puissent trouver sa place sans pression.
Ce père de trois enfants a lancé en octobre le hashtag #SquatForChange. En postant une photo de lui pliant les genoux pour pouvoir changer son bébé dans les toilettes pour hommes, il y dénonçait l'absence de table à langer. Comment arriver à l'égalité si les infrastructures restent dans le stéréotype de genre ?
Lui même critique cet état de fait : "Pourquoi ? Cela semble illogique quand on y pense. C'est comme si les pères n'avaient pas le droit de changer leur enfant dans les toilettes publiques [...] Pourquoi ne pas avoir de tables à langer dans les toilettes des hommes comme si on n'existait pas !.... Réglons ce problème !"
Avec son hashtag #SquatForChange, il a relayé les images de pères obligés de s'accroupir pour changer leur enfant dans les toilettes des hommes. Un internaute avait par exemple commenté ce geste : "Pourquoi partageons-nous des responsabilités égales mais la société nous voit différemment ?"
Co-créateur du mouvement du ruban blanc après la tuerie de l'école polytechnique de Montréal où 14 femmes avaient été assassinées par un masculiniste haineux des féministes, le Canadien Michael Kaufman est un allié de longue date du féminisme.
Michael Kimmel est lui sociologue à l'université Stony Brooke de New York. Son travail porte sur la déconstruction des masculinités.
A force de répondre aux questions des hommes qui les entouraient, ils ont décidé d'écrire un livre ensemble. Ce Guide du féminisme pour des hommes et par des hommes est sorti en France cette année. Un petit livre à mettre entre toutes les mains.
Certains hommes n'écoutent pas les femmes quand il s'agit de féminisme. Parfois ont-ils aussi besoin de se retrouver entre eux pour évoquer ces questions-là. Alors ce livre est un petit manuel nécessaire pour les aider à cheminer vers le féminisme et les aider à se prendre en main.
Pas besoin d'être une star ou un ponte des réseaux sociaux pour être un homme féministe. On ne va pas vous donner un cookie, parce que l'égalité doit être normale. Mais, alors que l'égalité n'est franchement pas gagnée, vous en êtes néanmoins des apôtres nécessaires. En en parlant autour de vous, en prenant votre part.
Les hommes féministes étaient présents en nombre lors de la marche #NousToutes contre les violences sexistes et sexuelles.
Vous pouvez dire non aux blagues sexistes au bureau, prendre votre part juste des tâches domestiques, arrêter votre pote qui, en rigolant, se dit qu'il se la taperait bien cette "nana bourrée de la soirée, ce n'est pas grave elle ne s'en souviendra pas", ne pas pester quand votre collègue femme ou homme vous annonce son congé parental mais en mettant tout en oeuvre pour que cela se passe le plus facilement possible pour tout le monde...
Il n'y a pas de petites luttes dans le domaine de l'égalité de tous les jours. Et nous avons besoin d'alliés.