The Big Lebowski, Magnolia, Hannibal, The Hours... Une simple phrase ne suffirait pas à énumérer les rôles les plus emblématiques de l'actrice américaine Julianne Moore, aussi bien sacrée aux Oscars (pour Still Alice) qu'à Cannes et Berlin. Une carrière riche parcourue de cinéastes majeurs, de Ridley Scott à Steven Spielberg en passant par les frères Coen et David Cronenberg.
Mais aujourd'hui, c'est sur un autre terrain que s'exprime Julianne Moore. En Une du magazine As If, la comédienne a fustigé le sexisme trop ordinaire d'Hollywood. Et s'en est notamment pris à une remarque trop familière : cette idée selon laquelle certaines actrices "vieillissent bien" et d'autres non. Une manière de dénoncer en filigrane le phénomène de l'âgisme, cet ensemble de discriminations et préjugés visant les personnes d'un certain âge, et notamment les femmes ayant passé le cap des cinquante ans.
On l'écoute : "Il y a tellement de jugement inhérent à l'expression : 'vieillir avec grâce'. Y a-t-il une façon disgracieuse de vieillir ? Nous n'avons pas d'option bien sûr. Personne n'a d'option sur le vieillissement, donc ce n'est pas une chose positive ou négative, cela existe, c'est tout". On ne peut guère être plus limpide.
"Vieillir fait partie de la condition humaine, alors pourquoi en parlons-nous toujours comme si c'était quelque chose que nous contrôlons ?", a encore développé Julianne Moore, actuellement saluée pour sa performance dans la mini-série Histoire de Lisey, adaptation du livre éponyme de Stephen King. Pour l'actrice américaine, cette idée de "bien vieillir" ou de "mal vieillir", trop souvent accolée aux actrices, est "totalement sexiste". Voilà qui est dit.
"Enfant, on nous raconte que nous continuerons à grandir à l'école, peut-être aller à l'université puis, une fois l'école terminée, que notre croissance sera achevée. Or [suivant cela], comment pouvons-nous au juste continuer à nous challenger, à nous intéresser à nous-mêmes, apprendre de nouvelles choses, être utile aux autres, être la personne dont nos amis et notre famille ont besoin, évoluer, vivre des expériences encore plus profondes ?", s'interroge Julianne Moore. Par-delà le sexisme, c'est donc un questionnement philosophique qui la préoccupe.
"À partir du moment où les femmes franchissent le cap 'fatal' de la ménopause, elles sortent du groupe des femmes procréatrices et elles perdent de ce fait ce qui est considéré depuis toujours comme leur principale fonction sociale. Elles disparaissent en tant que sujets", déplorait la philosophe et professeure de sciences politiques féministe Camille Froidevaux-Metterie. Une fatalité que désire envoyer valser Julianne Moore, en rappelant aux femmes que l'âge est synonyme de ces "expériences plus profondes encore" qui se profilent au loin.