Hanane Al-Barassi, 46 ans, se battait pour défendre et faire entendre les femmes victimes de violences, notamment par le biais de l'association qu'elle dirigeait mais aussi de vidéos leur donnant la parole, qu'elle diffusait par la suite sur ses réseaux sociaux. Plus récemment, elle critiquait les groupes armés proches du maréchal Khalifa Haftar, décrit par l'Agence France-Presse comme "l'homme fort de l'Est".
Le 9 novembre, la veille de son assassinat, l'avocate et militante devenue figure médiatique déclarait d'ailleurs en ligne "qu'elle allait publier une vidéo exposant la corruption du fils du dirigeant de la LAAF (armée nationale libyenne, autoproclamée par Haftar, ndlr), Saddam Haftar", rapporte Amnesty International. Quelques minutes avant sa mort, assise au volant, elle condamnait de nouveau les actes des deux hommes en live sur Facebook, confiant se sentir "menacée".
"Hanane Al-Barassi a été tuée par balles dans la rue 20, l'une des plus grandes artères commerçantes de Benghazi", détaille à l'AFP la source sécuritaire, qui a requis l'anonymat. Un meurtre qui a suscité l'émotion du pays et la colère de celles et ceux qui partagent sa cause.
"L'assassinat d'Hanane [Al-Barassi] met en évidence la menace qui pèse sur la vie des femmes qui s'expriment sur les questions politiques en Libye", souligne Amnesty International. Pour l'avocate libyenne Elham Saudi, il s'agit d'une nouvelle "effrayante et épouvantable", mais aussi d'"un rappel douloureux de la réalité sur le terrain, en particulier pour les femmes". Il y a un an et demi, la parlementaire Siham Sergewa critiquait elle aussi les actions du maréchal Haftar, et son offensive lancée sur Tripoli, la capitale du pays. Elle a disparu sans laisser de traces.
Sur Twitter, la chercheuse à l'ONG Human Rights Watch Hanan Salah dénonce l'impunité dont profitent les meurtriers et abducteurs, et demande "aux autorités de l'Est devraient enquêter rapidement et tenir les auteurs responsables". Pour l'instant, celles-ci n'ont pas réagi.
Après la chute du régime de Mouammar Kadhafi, en 2011, la Libye a été arbitrairement partagée entre le gouvernement d'accord national (GAN), basé à Tripoli, dans l'ouest, et reconnu par l'ONU, et un pouvoir incarné par Khalifa Haftar. En avril 2019, ce dernier lançait donc une offensive sur la capitale, dont les combats n'ont cessé qu'en juin 2020. Un cessez-le-feu a été signé en octobre, et depuis lundi 9 novembre, les représentants libyens ont entamé des pourparlers directs en Tunisie, afin de trouver un règlement politique au conflit, précise l'AFP. A voir si cet événement terrible les impacte.