Si vous étiez encore persuadé(e) que le monde de la recherche scientifique, terre d'excellence et d'exigence, était dénué de toute once de machisme, et considéraitles femmes comme égales à leurs homologues masculins, vous ne pourriez pas vous tromper davantage.
La preuve avec la "mésaventure" vécue par la généticienne de l'Université du Sussex Fiona Ingleby et sa consoeur Megan Head, biologiste à l'Australian National University. Ensemble, les deux jeunes femmes ont rédigé une étude justement consacrée au sexisme dans le milieu universitaire. S'intéressant plus particulièrement aux différences de traitement entre hommes et femmes dans le passage de la thèse au post-doctorat, Fiona Ingleby et Megan Head ont constaté que les femmes ayant un doctorat en biologie publiaient moins d'articles que leurs pairs masculins, rapporte le Times Higher Education .
Une fois leur étude rédigée, les deux scientifiques l'ont donc adressé à PLoS ONE , une revue scientifique en ligne dont les articles sont soumis à l'avis d'un comité de lecture. Comme beaucoup d'autres travaux universitaires, l'article écrit par Fiona Ingleby et Megan Head a été confié à un relecteur qui ne l'a pas jugé publiable en l'état.
Les hommes écrivent "des articles de meilleure qualité"
L'histoire aurait pu s'arrêter là, si Fiona Ingleby ne s'était pas sérieusement penchée sur les motifs de ce refus de publication, et surtout si elle ne les avait pas publiés sur Twitter. Car, au milieu de remarques plutôt vachardes mais éthiquement acceptables – le correcteur qualifie notamment le travail des deux scientifiques de "méthodologiquement faible" – le relecteur se permet d'émettre un avis tout personnel sur les façons dont elles pourraient améliorer leur étude. D'après lui, il serait en effet "bénéfique de trouver un ou deux biologistes masculins avec lesquels travailler (ou du moins d'obtenir d'eux qu'ils relisent l'étude ou, encore mieux, qu'ils en soient les actifs co-signataires)". Et d'affirmer que si les hommes voyaient davantage de leurs travaux être publiés dans des revues prestigieuses, c'est "parce que leurs articles sont effectivement de meilleure qualité".
À moins, poursuit-il, que ce ne soit "simplement dû au fait qu'en moyenne les hommes travaillent plus d'heures par semaine que les femmes, sont en meilleure santé et plus endurants".
Face à ces remarques hallucinantes de sexisme, Fiona Ingleby a décidé de répliquer. Trois semaines après avoir fait appel de la décision de PLoS ONE de ne pas publier ses travaux et face à l'absence de réaction de la revue, la généticienne a rendu l'histoire publique sur Twitter, ce qui n'a pas manqué de susciter la réaction des internautes.
Outrés, ces derniers ont retweeté plus de 2 000 fois Fiona Ingleby et pris sa défense sous le hashtag #AddMaleAuthorGate.
Cette mobilisation sur le web a heureusement fini par porter ses fruits, puisque depuis, PLoS ONE a présenté ses excuses et supprimé la critique de l'étude. Cette dernière sera d'ailleurs soumise à une nouvelle relecture pour une éventuelle publication en ligne.