Aujourd'hui encore, les règles sont entourées d'un tabou nocif. En démontrent certaines pubs pour produits hygiéniques qui remplacent encore le sang rouge par un liquide bleu. Ou les noms de code qu'on attribue à cette "partie du mois" ou aux tampons qu'on demande en douce à nos amies, collègues, camarades de classe. Une façon de faire perdurer la stigmatisation qui règne autour des menstruations, et qui contribue aussi à un fléau qu'il reste nécessaire d'adresser : la précarité menstruelle, ou le fait de ne pas pouvoir s'acheter de protections, faute de moyen.
Le terme est de plus en plus mentionné, et les progrès pour l'anéantir à travers le monde aussi. L'Ecosse a d'ailleurs adopté la gratuité des protections hygiéniques le 25 février, permettant à des millions de femmes de ne pas avoir à recourir à des alternatives douteuses et surtout dangereuses pour la santé.
C'est justement pour éveiller les consciences que l'association à but non-lucratif PERIOD, en partenariat avec l'agence Huge, a lancé une campagne qui soulève un point pertinent : et si les hommes avaient à payer pour utiliser du papier toilette dans les espaces publics, comme les femmes doivent le faire pour se procurer des protections hygiéniques ? De cette interrogation est née une expérience sociale. Dans plusieurs WC pour hommes, les deux organismes ont installé des distributeurs de PQ payants "pour montrer à tout le monde ce que ça fait d'être à court d'issue", explique l'une des intervenantes.
Pour quelques feuilles, les utilisateurs doivent insérer une pièce de 25 cents dans la machine. Injuste ? C'est ce que les femmes vivent chaque mois, dans 92 % des toilettes publiques américaines, insiste le clip. Heureusement, un autre moyen d'accéder au précieux papier s'offre à eux : tweeter en faveur de la gratuité des produits hygiéniques sous le hashtag #FreeThePeriod. Une façon d'intensifier le dialogue autour du sujet crucial.
"L'année dernière, nous avons construit Hooha, un distributeur de tampons intelligent qui permet d'envoyer des SMS pour obtenir un tampon gratuit, ce qui a permis d'entamer une conversation sur l'accessibilité des tampons dans les toilettes publiques. Cette année, nous voulions faire passer le message, c'est pourquoi nous nous sommes associés à PERIOD pour recréer l'expérience de ce que l'on ressent lorsqu'on vous demande de payer pour un besoin humain de base avec un moyen de paiement obsolète", déclare Steph Loffredo, fondatrice de Hooha et directrice associée du marketing social chez Huge.
En France, ce sont pas moins d'1,7 millions de personnes qui sont concernées par la précarité menstruelle. Un constat contre lequel le gouvernement a enfin décidé de se battre, en instaurant, de manière expérimentale, l'accès gratuit aux produits périodiques pour les femmes précaires en 2020. "[Cela] va vraiment permettre à toutes ces femmes aujourd'hui et à l'avenir de vivre leurs règles dignement", estimait Tara Heuzé Sarmini, présidente de l'association Règles élémentaires, au micro d'Europe 1. Espérons que l'expérience soit concluante et qu'elle s'étende, comme en Ecosse, au plus grand nombre.