Pour nombreux·se·s, le sexe est source de plaisir et de bien-être. D'émancipation, de confiance en soi, de pouvoir aussi parfois, et de célébration de son corps. Pour d'autres, c'est un sujet auquel on ne s'intéresse pas. Qui ne nous fait pas vibrer, qui ne correspond pas à notre vision des relations telles qu'on souhaite les vivre. Et c'est très bien comme ça.
Pour certain·e·s encore, c'est le lieu d'une angoisse nocive.
Dans ce cas précis, les rapports sexuels nous oppressent rien que de s'imaginer nu·e devant l'autre. On subit la crainte de ne pas être "performant·e", de ne pas vraiment savoir comment s'y prendre, voire de ne pas réussir à jouir, ce qui ferait de nous un·e mauvaise amant·e, se convainc-t-on silencieusement. Toutes ces peurs se transforment alors en un blocage physique et psychologique étouffant. C'est ce qu'on appelle l'anxiété sexuelle.
Tout ce qui touche au sexe et aux potentiels soucis que l'on pourrait rencontrer autour de l'acte ne sont pas toujours facile à formuler. Voire en réalité : jamais. Ce que certain·e·s ressentent comme une injonction à l'orgasme et à l'épanouissement au lit, entre autres, rendent la face moins reluisante du sujet d'autant plus taboue. Du coup, on met nos problèmes sous le tapis en pensant que les seules personnes qui pourraient nous aider sont celles qui se sont confiées sur des forums obscurs qu'on consultera une fois tout le monde couché. Inutile de préciser qu'on a tort.
Le sexe n'est pas qu'une partie de plaisir. Faire l'amour n'a rien d'un automatisme qui fonctionne à tous les coups. C'est charnel, certes, mais aussi spirituel. Et par conséquent, notre tête et la pression qu'on se met - souvent aidé·e de bon coeur par la société - peuvent influer négativement sur nos ébats.
Le site MedicalNewsToday parle d'anxiété sexuelle, qu'il définit comme un syndrome touchant "les hommes et les femmes de tout âge, quelle que soit leur expérience. Pour certain·e·s, il est de courte durée et peut apparaître brièvement à la suite d'une nouvelle relation sexuelle. D'autres, en revanche, peuvent éprouver des difficultés à mener une sexualité saine à cause de cette anxiété, et ce de manière plus régulière".
Kate Moyle, sexothérapeute britannique, affirme à The Telegraph : "Les problèmes sexuels sont bien plus fréquents qu'on ne le pense et même les chiffres dont nous disposons sont probablement inférieurs à la réalité, car les cas sont sous-déclarés en raison de la gêne qu'ils provoquent". Qu'on se rassure, donc : on est plein à ne pas vivre les rapports comme une explosion de sensations irrésistibles, loin de là. Et les témoignages de courageux·se·s le prouvent.
Steph Auteri, Américaine de 37 ans, raconte au magazine Healthline la façon dont elle a commencé à se remettre en question sur le plan sexuel, après que son premier partenaire l'ait continuellement rabaissée dans la chambre à coucher. "Je me sentais gênée et nerveuse d'être une déception pour l'autre personne", livre-t-elle. "Je ne me sentais jamais sexuelle, je ne voulais jamais être intime, et je n'initiais jamais rien".
Même avec des personnes différentes, elle se prend à espérer que l'acte se termine vite. "Je me sentais brisée", admet-elle. "Et plus que tout, je me sentais coupable de ne pas être comme tout le monde. Je pensais que je n'étais pas quelqu'un avec qui cela valait la peine de s'engager. Et puis, je finissais par m'en vouloir de me sentir coupable et je n'avais encore moins envie de faire l'amour. C'était un cercle vicieux", détaille la jeune femme.
Pour la sexothérapeute Dre Katherine Hertlein, il s'agit bel et bien d'anxiété sexuelle, un phénomène qui peut être "le résultat d'une maladie sous-jacente, de facteurs relationnels, de luttes de pouvoir, de peurs, de troubles de l'humeur et d'autres problèmes de santé mentale, de facteurs culturels ou religieux, d'un effet secondaire si vous prenez certains médicaments, ou de bien d'autres choses encore", énumère la spécialiste.
Elle estime d'ailleurs que cela se manifeste de différentes manières. "Principalement par des symptômes de troubles sexuels, comme une incapacité à maintenir une érection (pour les hommes) ou une incapacité à atteindre l'orgasme, même si vous trouvez votre partenaire sexuellement attirante. Parfois, cela peut aussi entraîner une éjaculation précoce ou un désintérêt pour le sexe". Cependant la spécialiste le garantit : il existe des solutions qui marchent.
Afin de réussir à retrouver un équilibre serein, et redevenir maîtresse de sa sexualité - c'est à dire faire l'amour comme on en a envie, quand on en a envie, sans que notre libido soit affectée par l'anxiété - il reste important de consulter un·e praticien·ne qualifié·e. La Dre Hertlein donne également quelques conseils avisés.
D'abord, elle pose les bases, en expliquant comment améliorer son hygiène de vie. "Veiller à dormir sept à huit heures par nuit, avoir une alimentation saine et équilibrée et faire régulièrement de l'exercice, même si ce n'est qu'une heure de marche par jour", recommande-t-elle. "Ces changements semblent simples, mais ils nous permettent de donner le meilleur de nous-mêmes pour faire face à tout ce que la journée nous réserve."
Elle rentre ensuite dans le vif du sujet, en s'attaquant à la notion de "performance" souvent trop profondément associée à l'acte sexuel, quelque soit notre genre. "Essayez de ne pas faire du sexe une expérience axée sur un but. Il s'agit de prendre son temps, de profiter de l'autre et de trouver l'intimité et la connexion. Non seulement cela vous soulagera de la pression que vous et votre partenaire subissez, mais c'est aussi une chance d'apprendre ce que vous trouvez sensuel. Pensez-y comme une ardoise vierge et un moyen d'explorer ce que vous aimez sans la pression du temps ni le but final", insiste l'experte.
Enfin, elle conseille vivement de s'ouvrir à la ou les personnes qui partagent nos nuits. "L'anxiété dans votre relation n'est probablement pas une chose confortable, mais il peut être utile de parler à votre partenaire de vos angoisses, surtout si votre première réaction est d'éviter le sexe. Cela l'aidera à comprendre ce que vous vivez et vous permettra de le surmonter ensemble. Plus le sujet est clair et plus la communication est bonne, plus il sera facile pour vous deux de vaincre cet obstacle". Et sans aucun doute, d'être à nouveau comblé·e, à son rythme et en accord avec l'intensité de son désir quelle qu'elle soit.