Si vous n'avez jamais entendu parlé du syndrome prémenstruel, vous êtes au bon endroit. Si vous vous reconnaissez immédiatement dans sa description aussi. Le "SPM" définit ces maux que l'on ressent quelques jours avant les règles et qui peuvent durer jusqu'à la fin des saignements menstruels. Des douleurs physiques type mal de ventre, migraine, problèmes de peau, mais aussi psychologiques. Beaucoup de femmes sont davantage à fleur de peau pendant cette période, plus irritables, plus sensibles.
Pour certaines, les changements d'hormones sont si violents qu'ils affectent concrètement leur quotidien. C'est le cas de Caroline*, 35 ans, qui nous raconte le calvaire qu'elle vit presque une fois par mois : "Je ressens comme si je tombais en grosse dépression d'un coup, de manière assez brutale. Ça me submerge complètement, comme si je changeais de caractère, de manière de voir les choses. Je change même d'avis sur mes choix de vie."
Un bouleversement qui, s'il reste psychologique, est si intense qu'il la déstabilise parfois même dans son rôle de mère : "La dernière fois, ça a été terrible. J'étais tout le weekend avec mes enfants et je n'y arrivais pas. Je me suis même dit qu'il fallait que j'appelle quelqu'un à l'aide, je me sentais démunie". C'est à ce moment-là, il y a plusieurs mois, qu'elle a voulu en savoir davantage sur ce comportements changeant.
Elle se documente et découvre ce qui l'ébranle à ce point : le syndrome prémenstruel. S'ils n'apparaissent que tardivement dans sa vie de femme, c'est parce qu'elle a troqué la pilule pour le stérilet.
Désormais, elle tente de mettre au point un stratagème pour y être mieux préparée : "J'essaie de simplifier tout ce qui peut l'être dans mon quotidien pour me sentir moins enfermée dans une routine prenante – je sais que dans ces moments-là, je veux tout changer, partir, et je me dis 'non, dis-toi que ça va passer'. Il faut tenir pendant trois jours, c'est presque incompréhensible".
Côté médical, elle se dirige vers sa pharmacienne, seule personne qualifiée de confiance qui l'entoure, qui lui conseille de la phytothérapie pour réguler ses émotions. "C'est difficile d'en parler, même à mon conjoint. Je lui ai dit pourquoi ça n'allait pas, il ne le prend pas au sérieux, il ne comprend pas ce changement hormonal."
Pour Caroline, le sujet n'est pas du tout assez abordé : "Le mouvement qui veut lever de tabou autour des règles est sain car on essaie toujours de les cacher, mais il est aussi important de parler de tout ce qui se passe avant les menstruations". Elle déplore également le manque d'aide de la part des médecins : "On nous dit 'faites du yoga et ça passera'. Et si je n'ai pas envie de faire du yoga ? Je n'ai pas envie de méditation non plus, ni de médicaments. Je suis un peu dépourvue, je ne sais pas trop quoi faire à part mes petites plantes qui peuvent m'aider."
Héloïse*, 21 ans, réglée depuis 10 ans et sous pilule, souffre elle aussi de cette sensibilité flagrante, quelques jours avant l'arrivée de ses menstruations. "Plus mes règles approchent, plus je suis en vrac", affirme-t-elle."Je ressens pendant environ 3 jours que je suis beaucoup plus à fleur de peau. Je suis une personne très sensible de manière générale, mais l'arrivée de mes règles (et parfois pendant) décuple énormément ma sensibilité émotionnelle. Triste, blessée, énervée, pour un rien. Je pleure beaucoup sans qu'il n'y ait de raison apparente."
Au contraire de Caroline, elle subit également des symptômes physiques.
"Mal en bas du dos, mal en bas du ventre qui s'intensifie lorsqu'elles sont arrivées, au point de ne pas pouvoir me lever, à rester pliée en deux. Je ressens des douleurs aux ovaires, des courbatures dans les jambes... J'ai mal dans tout mon corps ; et cela me fatigue d'autant plus. Je sens également que ma digestion se dérègle, mes selles sont beaucoup moins formées."
Pendant longtemps, elle ne pense pas que cela puisse être dû à ses menstruations. Et puis elle en parle à une amie qui souffre de la même chose et réalise, il y a un an, que tout est lié. Comme Caroline, elle trouve du soutien auprès d'autres femmes qui vivent une situation similaire. "Rien ne m'a été diagnostiqué de particulier", assure-t-elle.
Dans un cas comme dans l'autre, les solutions sont difficiles à trouver. Comme si souffrir autant avant ses règles faisait partie du lot d'être une femme, comme si c'était "normal". Alors que non, les personnes menstruées ne devraient pas être à la merci de ces douleurs insupportables. Et le seul recours ne peut pas être la pilule qui, si elle incarne une avancée considérable que l'on salue évidemment, oblige aussi à une prise d'hormones en continue dont les effets secondaires peuvent être violents.
Ce qu'il reste à faire de notre côté, c'est délier la parole sur le syndrome prémenstruel pour qu'il soit enfin pris au sérieux, et traité comme ce qu'il est : des maux parfois insoutenables.
*Les prénoms ont été changés