La séquence daterait d'il y a deux ans, mais ne circule sur les réseaux sociaux que depuis quelques jours. Dessus, on voit Hicham, candidat de téléréalité de l'émission JLC Family, penché sur une jeune femme assise par terre. Il lui crie dessus, semble frapper contre un mur, puis attrape sa tête violemment avec ses deux mains.
La vidéo est filmée par deux autres personnes, Dylan Thiry, Ahmed Thaï et Marvin Tillière (condamné pour violences et cyberharcèlement envers son ex-compagne en 2021), qui n'interviennent à aucun moment pour empêcher leur ami d'agresser la jeune femme, et se contentent d'afficher un visage hilare. Seule une autre invitée tente de s'interposer, sans succès.
"La jeune femme a posté ensuite des images de ses bleus sur les bras", informe la journaliste Constance Villanova sur Twitter. L'agresseur, lui, affirme qu'il ne l'aurait pas frappée, mais qu'il aurait "pété les plombs" car il l'aurait prise en flagrant délit de vol d'argent et de bijoux. "Voici la raison invoquée pour hurler sur une jeune femme, lui tirer les cheveux et probablement la [rouer] de coups", poursuit-elle. Les autres candidats proposent quant à eux de lui cracher dessus.
"J'ai pété les plombs, d'accord ? Dans la vidéo, on va essayer de faire croire que je l'ai frappée. Chose qui n'est pas vraie. Si vous regardez bien, j'ai tapé dans le mur. Je peux même vous mettre la photo de ma main pour voir comment elle était gonflée", argumente Hicham face caméra, dans une publication où il entend expliquer son acte. "On invite des gens dans des soirées et des moments entre nous. C'est pas pour se faire voler derrière !" Il martèle par ailleurs : "quand je lui ai parlé, la fille m'a mis une baffe. Elle a cassé une bouteille d'alcool sur la table. Elle a essayé de me la jeter... Il s'est passé plein de choses !"
Une justification hallucinante qui en dit long sur le sentiment de toute puissance – ici en faisant justice soi-même – renforcé par l'impunité qui règne dans le milieu de la téléréalité, particulièrement effroyable au vu de l'influence des participant·es. "Il n'y a aucune raison, bonne ou mauvaise, d'humilier une femme", rappelle une personne sur les réseaux sociaux, où de nombreux·ses internautes ont exprimé leur indignation à la vue des images. Une autre observe qu'"une personne normale aurait appelé la police et point barre".
La victime présumée aurait confié avoir été tirée dans une pièce et battue par Hicham.
"Ces candidats suivis par des millions d'ados perpétuent encore des violences sexistes et sexuelles. Les boîtes de production vont-elles continuer à mettre des agresseurs et des complices à l'écran comme ça à déjà été le cas ?", interpelle Constance Villanova. Une urgence à créer une téléréalité "safe" et à briser l'omerta que Valérie Rey-Robert évoque également dans son livre Téléréalité : une fabrique du sexisme.
Elle y aborde notamment le cas de Nathanya Sion, qui a témoigné des violences présumées perpétrées par un autre candidat, Illan Castronovo, et qui aurait été poussée au silence par son agente, l'influente Magali Berdah. A cette impunité écoeurante s'ajoute, épingle l'autrice féministe, l'indifférence, le sexisme et le mépris de classe dont souffre le genre et ses participantes.
"Les violences envers les minorités sont monnaies courantes dans le milieu de la téléréalité", constate à son tour la militante Alice Pfältzer, derrière l'ouvrage Garce, hystérique et autres joyeusetés, co-écrit avec Laëtitia Abad Estieu. "Puisque ce type de divertissement subit de plein fouet le classisme dont nombre de personnes aiment faire preuve, ces questions sont laissées à la presse spécialisée et aux blogueur·euses." Et de conclure : "Or, ce terrain mérite tout autant notre attention et la force de nos luttes."