C'est "un cri d'alarme" que lance aujourd'hui la branche française de l'Unicef. Dans un rapport rendu public ce mardi 9 juin, le Fonds des Nations Unies pour l'enfance dresse un bilan accablant de la pauvreté infantile dans l'Hexagone : 3 millions d'enfants, soit un enfant sur cinq, vivent aujourd'hui sous le seuil de pauvreté. 31 000 enfants sont sans domicile, 10 000 habitent des bidonvilles et 140 000 enfants de moins de 18 ans décrochent chaque année de l'école avant d'avoir obtenu un diplôme, précise l'étude.
"Notre rapport est un cri d'alarme qui doit pousser les autorités à agir d'urgence et de manière plus efficiente pour chaque enfant", insiste Michèle Barzach, la présidente de l'Unicef France, qui remettra aujourd'hui le rapport au président de l'Assemblée nationale, Claude Bartolone ainsi qu'aux experts du Comité des droits de l'enfant.
"Chaque enfant compte. Partout, tout le temps", martèle Michèle Barzach, qui pointe l'aide "dramatiquement insuffisante" mise en place par l'État pour lutter contre le fléau de la pauvreté infantile. "En dépit d'efforts considérables, la France échoue en partie à l'égard de l'enfance et de la jeunesse et ce sont les plus fragilisés par la pauvreté, l'exclusion sociale, les discriminations, mais aussi par cette période si particulière qu'est l'adolescence, qui en payent le plus lourd tribut."
D'autant que la crise économique a encore fragilisé la situation déjà précaire des plus démunis : le rapport explique en effet qu'entre 2008 et 2012, 44 000 enfants supplémentaires ont plongé avec leurs familles dans la pauvreté. Beaucoup d'entre eux "cumulent les inégalités aux conséquences désastreuses pour leur avenir et celui de la société".
Le rapport pointe notamment du doigt la "situation inacceptable des enfants migrants non accompagnés et/ou vivant en bidonvilles". Privés de leurs droits fondamentaux, victimes de discriminations, ces mineurs isolés étrangers "comptent parmi les plus vulnérables". Pour Michèle Barzach, cela conduit "à des situations indignes" comme la traite des êtres humains.
Autre sujet de "forte inquiétude et de déception" mis en lumière par le rapport : l'absence manifeste d'une justice pénale pour mineurs qui "creuse les inégalités". Alors que les gouvernements successifs s'y étaient engagés, les tribunaux correctionnels pour mineurs n'ont toujours pas été supprimés. L'Unicef France demande par ailleurs qu'un seuil de responsabilité pénale soit fixé à l'âge le plus élevé possible, sans exception prévue, et assorti d'un critère complémentaire de discernement.
Le rapport pointe enfin les disparités territoriales "de plus en plus marquées, particulièrement criantes en France ultra-marine".
"La stratégie globale pour l'enfance n'existe toujours pas. Il n'y a pas de véritable politique publique de l'enfance et de l'adolescence consolidée et articulée, ni de mécanisme de suivi et d'évaluation à la hauteur", regrette Michèle Barzach. "Nous pourrions faire beaucoup mieux avec les mêmes moyens."
Pour aider le gouvernement à y parvenir, le rapport de l'Unicef émet 36 recommandations concrètes parmi lesquelles la stabilisation des familles vivant en bidonville en leur permettant un meilleur accès aux dispositifs sociaux, ou encore l'abandon des tests osseux pratiqués sur les mineurs étrangers pour déterminer leur âge.