Société
Violences conjugales : des téléphones sécurisés pour les Australiennes harcelées par leur conjoint
Publié le 21 mars 2016 à 16:56
Par Hélène Musca | Rédacteur
Afin de protéger les femmes harcelées par leur conjoint, l'organisme national australien de lutte contre la violence conjugale a lancé une initiative originale pour enrayer le phénomène.
Des téléphones portables sécurisés contre le harcèlement Des téléphones portables sécurisés contre le harcèlement© Getty Images
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La technologie s'est taillée une place de choix dans nos vies : omniprésente dans notre quotidien, c'est maintenant notre principal outil de travail, d'information et de communication. Cette ubiquité que nous offre l'essor de la technologie s'accompagne bien évidemment de dangers. Les détournements abusifs de ces outils implantés au coeur de nos vies sont malheureusement monnaie courante: harcèlement scolaire, cyberviolence, prédateurs sexuels sur Facebook... Mais un aspect des utilisations abusives de la technologie reste cependant méconnu : le harcèlement domestique technologique.

Pour beaucoup de femmes victimes de violences conjugales, la technologie peut devenir un moyen supplémentaire pour leurs conjoints de perpétrer leurs violences. Les smartphones et les réseaux sociaux deviennent des outils de choix pour traquer et harceler constamment ces femmes, à travers des SMS, des messages Facebook humiliants ou menaçants, et grâce à la géolocalisation dont sont équipés de nombreux téléphones, mais aussi des réseaux sociaux comme Facebook. On peut désormais connaître les moindres faits et gestes d'une personne simplement en contrôlant son téléphone : nos smartphones sont des outils si complets, qui rassemblent tellement de fonctionnalités et d'applications, qu'ils sont en réalité une fenêtre grande ouverte sur notre vie privée. La technologie permet donc à un conjoint abusif d'exercer un contrôle absolu sur sa femme à travers son smartphones : il peut non seulement exercer une pression constante sur elle, mais aussi surveiller ce qu'elle dit, les gens avec lesquels elle communique, les sites qu'elle consulte, ses déplacements...

Les smartphones: une fenêtre grande ouverte sur notre vie privée © Getty Images
Des téléphones sécurisés pour les femmes victimes de violences conjugales


C'est pourquoi en Australie, le Women's Services Network, aussi appelé WESNET, a passé un accord avec Telstra, une entreprise de télécommunications, afin de donner naissance au Telstra Safe Connections Partnership. Ce partenariat a pour but d'enrayer l'essor rapide du harcèlement domestique technologique : en effet, une étude australienne menée par le WESNET en 2015 a démontré que 98% des professionnels travaillant avec des victimes de violences conjugales ont suivi des femmes qui connaissaient ou avaient connu une forme d'harcèlement technologique. Pour Karen Bentley, la directrice du Women's Services Network, "un nombre croissant de femmes est victime de ce type de harcèlement depuis 5 ans".

Pour lutter contre ce phénomène, Telstra s'est engagé à donner 210 000 téléphones sur une durée de 3 ans au WESNET, afin de fournir aux femmes victimes d'abus domestiques des téléphones sécurisés. Ces appareils, de type HTC ou Samsung, utilisent un navigateur privé, qui ne laisse aucune trace dans l'historique. Ils sont également équipés d'un système de protection de données qui permet de créer un mot de passe avancé pour chacun des comptes créés. Aucun des mots de passe ne peuvent être stockés dans la mémoire de ces téléphones sécurisés, et ils n'ont aucun journal d'activités. Ils ont l'air de téléphones parfaitement normaux, mais ces différents dispositifs garantissent la protection de leurs propriétaires lorsqu'elles utilisent la technologie. De plus, ils sont équipés d'applications cachées spécialement adaptées au besoin des femmes victimes de violences, comme un service leur permettant de rester en contact avec leurs proches sans que leurs maris l'apprennent, d'appeler à l'aide, ou de joindre en urgence les secours simplement en prononçant à voix haute un mot de sécurité. En 2014, 2 500 téléphones de ce type ont déjà été distribués par WESNET à des femmes victimes de violences conjugales.

WESNET fournit des téléphones sécurisés aux victimes de violences conjugales pour garantir leur protection © Getty Images
Garantir aux femmes un accès sécurisé à la technologie

Le programme de WESNET aide également ces femmes à apprendre à utiliser leurs téléphones de manière sûre, à reconnaître et à éviter le harcèlement technologique, mais aussi à rassembler à l'aide de leurs smartphones des preuves qui pourront être utilisées contre leur conjoint dans le cadre d'une action en justice. L'objectif final, pour WESNET, est en fait de maintenir l'accès de ces femmes à la technologie. Il est absolument primordial d'éviter que les femmes victimes d'abus domestiques cessent d'utiliser leurs portables ou les réseaux sociaux lorsque leurs maris s'en servent contre elles. Malheureusement, c'est pourtant la ligne de conduite qu'elles sont souvent incitées à tenir. Or, les pousser à ne plus utiliser la technologie pour ne plus subir d'harcèlement technologique domestique revient à les offrir pieds et poings liés à leurs bourreaux. La technologie est aujourd'hui ce qui nous permet de nous lier aux mondes et aux autres : en priver ces femmes, c'est les laisser seules, isolées et démunies face aux violences qu'elles subissent.

Cette initative devrait ainsi permettre de renverser la situation, en faisant de la technologie non plus un outil d'harcèlement prisé par les conjoints abusifs, mais un moyen pour les femmes victimes de violences conjugales de pouvoir être aidées et protégées.

Mots clés
Société Violences conjugales News essentielles harcèlement
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