GLOW, pour "Gorgeous Ladies of Wresting", ou dans notre langue, les "Catcheuses magnifiques". Le terme n'est pas sorti de l'imagination de scénaristes inventifs, mais a été créé en 1985, date à laquelle a été montée une équipe de catch féminin pour la télévision américaine. Les filles de GLOW portaient des justaucorps fluo en lycra, du make-up façon Ziggy Stardust, et se battaient sur un ring en suivant des scénarios kitschouilles, cela durant 4 saisons. Objet de culte aux États-Unis, cette émission à base de paillettes et d'armbreaker a inspiré Liz Flahive (Homeland, Nurse Jackie) et Carly Mensch (Nurse Jackie, Orange is the New Black). En 2017, GLOW devient donc une série Netflix. On y trouve des nanas marginalisées d'Hollywood, prêtes à se transformer en catcheuses pour un peu de célébrité. Mais les rêves de gloire et d'argent, vont bien vite être remplacés par une chose bien plus importante : la sororité.
Le casting de GLOW se compose à 90% de femmes. De quoi se réjouir. Une série féminine donc, mais jamais précieuse. Les personnages féminins sont profonds, intenses, pas toujours sympathiques, bizarres même. Mais ces outsiders ont toutes une chose en commun, un grand désir d'émancipation. Ruth, l'héroïne (Alison Brie) est une actrice sans le sou, faible, mais pour qui le catch et la vie en communauté avec d'autres femmes va lui permettre de trouver un but à sa vie et de gagner confiance en elle. Elle est soutenue par un casting parfait, dont Britney Young, qui interprète Carmen, la fille d'un catcheur célèbre qui refuse de voir sa seule progéniture portant un utérus fouler un ring – ce qui évidemment n'est pas le cas pour ses frères. Dans le rôle de Sheila, une femme se prenant pour un loup, Gayle Rankin ajoute une belle dose d'étrangeté et de sensibilité.
Cet esprit de sororité et d'autonomie qui se met en place est bien sûr contrecarrer par les hommes. Sympathiques, drôles, attachants, mais habitués à avoir le dernier mot, le réalisateur et le producteur poussent les futures catcheuses à se choisir des alter-ego ultra stéréotypés. C'est ainsi que la seule Cambodgienne du groupe devient Fortune Cookie, tandis que l'Indienne se voit affubler du personnage de Beirut, une catcheuse libanaise et évidemment terroriste. Mais GLOW s'amuse allègrement de ce racisme ordinaire. Le féminisme, les stéréotypes, la sexualité, la maternité, les questions d'identité... tous ces sujets sont traités avec justesse et une bonne dose d'humour. Les dialogues sont tranchants, et la série oscille parfaitement entre comédie et drame. Avec GLOW, Netflix nous offre une ode à l'empowerment et probablement l'un de ses meilleurs shows.
Jenji Kohan, la créatrice d'Orange is the New Black, est à la production, et ça se ressent. Ainsi, le casting met à l'honneur une belle diversité raciale, mais aussi une diversité des corps et des personnalités. Les filles de GLOW sont blanches, asiatiques, noires, elles ont des carrures de géantes ou affichent des physiques de demi-portion. Elles sont rondes, minces, dingues de mode et des cosmétiques ou au contraire, pas franchement attirées par tout l'attirail de la féminité que nous vend la société, elles sont jeunes et aiment le punk, sont mères de famille et s'inquiètent de ce que leurs enfants penseront de cette aventure.
Comme le casting Orange is the New Black (ou celui de Transparent), le casting de GLOW montre à quel point, loin d'être hétérogène, la féminité est multiple. Qui plus est, la série ne cherche jamais la facilité. Ruth (Alison Brie), l'héroïne, apparaît bien vite comme un personnage très attachant avant qu'un secret vienne nous faire revoir notre jugement. Sebastian (Chris Lowell), le producteur friqué, passe rapidement d'abruti à jeune homme touchant, très attaché à ses catcheuses. Dans GLOW, les clichés et les stéréotypes sont envoyés valser, et c'est franchement réjouissant.
A l'instar de Stranger Things, GLOW est une lettre d'amour aux années 80. Mais si la série de science-fiction allait puiser du côté des Goonies et d'E.T, celle des catcheuses s'amuse plutôt avec les codes d'Hollywood. L'aura de Madonna n'est pas loin, et par moment, on se croirait propulser dans Flashdance ou dans un film de John Hughues (papa du Breakfast Club et de Ferris Bueller entre autres). Dans GLOW, Journey passe à la radio, la cocaïne est consommée en toute décontraction, le réalisateur est une star des films de série B, et se crêper les cheveux est aussi important que posséder une robe à épaulettes.
Mais les eighties ne forment pas une toile de fond toute en légèreté. En projetant leur histoire au milieu de cette décennie, Liz Flahive et Carly Mensch en profitent pour faire un état du monde à ce moment donné. Suite au déclinement de la Blaxploitation, Cherry (Sydelle Noel), une actrice et cascadeuse afro-américaine, se retrouve donc à jouer les catcheuses. En quittant le métier d'actrice pour devenir femme au foyer, Debbie (Betty Gilpin) est obligée de rejoindre la fine équipe pour s'émanciper financièrement. GLOW ne s'arrête pas seulement aux paillettes et à la laque, la série profite de cette période pour s'attaquer à des sujets forts et finalement pas si lointains. Une réussite en tout point.
Glow, sur Netflix, 10 épisodes, disponible à partir du 23 juin. Avec Alison Brie, Betty Gilpin, Britney Young...