En Afghanistan, le temps fait l'effet d'un sablier : chaque jour semble représenter un grain de sable en moins au sein de l'étendue des droits - bafoués - des femmes. Ainsi a-t-on appris le 1er avril dernier, par le biais du média américain NPR, la fermeture exigée par les Talibans d'une station de radio uniquement dirigée par des femmes.
Cette station s'intitule "Sadai Banowan". Du temps encore récent de son activité, elle prenait place dans le nord-est de l'Afghanistan. Elle se serait finalement vue contrainte de rendre l'antenne... pour avoir diffusé de la musique pendant le Ramadan. Cela, c'est la raison énoncée par Moezuddin Ahmadi, directeur de l'information et de la culture, le 1er avril dernier : "la station a violé les lois et règlements de l'émirat islamique".
Une "violation" également annoncée par la Direction du vice et de la vertu, mais que nie cependant ouvertement la cheffe de la station, Najia Sorosh, pour qui cette fermeture n'était "pas nécessaire".
En dari - une variété du persan parlée en Afghanistan - "Sadai Banowan" signifie "La voix des femmes". Une parole qu'on ne souhaite guère faire résonner au sein du pays...
Détail accablant parmi d'autres, cela faisait dix ans que "La voix des femmes" se propageait sur les ondes afghanes, résistant coûte au coûte aux diverses formes d'oppressions, ainsi qu'au retour au pouvoir des talibans. Ses huit employées se retrouvent désormais dépourvues de leur média d'expression.
"Les talibans nous ont dit 'vous avez diffusé de la musique'. Nous n'avons diffusé aucun type de musique", affirme encore de son côté Najia Sorosh. Une contradiction que la journaliste espère désormais faire entendre à l'international. Ne serait-ce que pour alerter. Comme le rappelle NPR, au cours de leur précédent règne à la fin des années 1990, les talibans "ont interdit la plupart des télévisions, radios et journaux du pays".
Cependant, précise le média en ligne, Moezuddin Ahmadi aurait soutenu la possibilité pour la station de radio "d'émettre de nouveau" si, et seulement si, elle donnait la garantie "d'accepter la politique de l'Emirat islamique d'Afghanistan et de ne pas répéter cette infraction". Un retour qui pourrait être primordial pour la liberté d'expression, des plus malmenée depuis quasiment deux ans désormais, des citoyennes afghanes.
Depuis leur retour au pouvoir en Afghanistan, les talibans n'ont cessé de restreindre les droits des femmes. Fin 2022 encore, ils ordonnaient aux responsables des parcs et jardins de Kaboul de fermer leurs portes aux Afghanes. Une étape en plus après l'exclusion des jeunes filles de l'école secondaire, l'obligation du port du voile ou encore l'interdiction pour les femmes de voyager seules en dehors de leur ville.