Le nouveau fait divers sanglant intervenu à Cézanne dans la Marne jeudi 28 novembre 2013, lors duquel un bijoutier a abattu dans sa boutique un braqueur qui menaçait son épouse, relance, deux mois après un autre braquage meurtrier à Nice, le débat sur la légitime défense qu’il nous parait indispensable de bien redéfinir.
Sur le plan juridique, la notion de légitime défense est strictement encadrée par les dispositions de l'article 122-5 du code pénal qui prévoit que:
« N'est pas pénalement responsable la personne qui, devant une atteinte injustifiée envers elle-même ou autrui, accomplit, dans le même temps, un acte commandé par la nécessité de la légitime défense d'elle-même ou d'autrui, sauf s'il y a disproportion entre les moyens de défense employés et la gravité de l'atteinte.
N'est pas pénalement responsable la personne qui, pour interrompre l'exécution d'un crime ou d'un délit contre un bien, accomplit un acte de défense, autre qu'un homicide volontaire, lorsque cet acte est strictement nécessaire au but poursuivi dès lors que les moyens employés sont proportionnés à la gravité de l'infraction. »
Il s’agit donc d’un cas d’irresponsabilité pénale qui exonère son auteur, alors que l’infraction est constituée. La légitime défense implique donc nécessité, simultanéité et proportionnalité pour trouver à s’appliquer.
Ne sera ainsi pas pénalement responsable la personne qui, face à un danger actuel ou imminent qui la menace elle-même, autrui ou un bien, accomplit un acte nécessaire à la sauvegarde de la personne ou du bien.
Encore faut-il qu’il n’y ait pas disproportion entre les moyens employés et la gravité du danger encouru : un commerçant, pour ouvrir le feu sur son braqueur, devra justifier que son agresseur l’aura menacé.
Dès lors, les choses sont claires: il existe un principe de réponse immédiate et proportionnelle à l'attaque, ce qui exclut, de fait, toute poursuite de l'assaillant par la victime agressée une fois le forfait perpétré, comme cela avait été le cas à Nice.
Mais il existe également dans le Code pénal (article 122-6) une présomption de légitime défense lorsque celui qui accomplit l'acte agit :
« 1° Pour repousser, de nuit, l'entrée par effraction, violence ou ruse dans un lieu habité ;
2° Pour se défendre contre les auteurs de vols ou de pillages exécutés avec violence. »
Donc, tout change la nuit tombée : si un cambrioleur s'introduit dans votre domicile à 2h du matin et que, vous sentant menacé, vous l'abattiez, vous serez présumé en état de légitime défense !
Et s’il n'est pas en principe envisageable de commettre un homicide volontaire en cas d'atteinte aux biens, il pourra légitimer si le vol est accompli avec violence.
Il s'agit donc seulement, on l'aura compris, d'un problème de fait, et non de droit, comme certains voudraient nous le faire croire, que les juges doivent apprécier au cas par cas, et ce de manière extrêmement stricte.
Au cas présent du bijoutier marnais, celui-ci encourt une peine de 30 ans de réclusion criminelle si la légitime défense ne lui était pas reconnue. Toutefois, il semblerait, d’après les premiers éléments recueillis, qu’il ait agi pour défendre sa compagne et, surtout, qu’il n’ait pas fait feu alors que son agresseur prenait la fuite, comme cela avait été le cas lors du récent braquage niçois dans lequel le Procureur de la République n’avait pas retenu la légitime défense.