Pendant longtemps, les règles sont restées un sujet tabou, entaché par de nombreuses croyances ancestrales. Aujourd'hui certaines figures du sport féminin commencent enfin à évoquer le problème, à l'image dela tenniswoman Heather Watson en début d'année. En avril 2015, c'était au tour d'une jeune femme anonyme de créer le buzz en décidant de courir le marathon de Londres sans protection périodique.
Étudiante au sein de la prestigieuse Université américaine de Harvard, Kiran Gandhi s'était entraînée avec ardeur tout au long de l'année pour pouvoir courir ce jour-là. Quelle ne fût pas sa déception de constater la veille du jour J, que ses règles venaient à peine de se déclencher. Pliée en deux à cause de la douleur, la jeune femme ne veut cependant pas renoncer à sa course et pense alors à s'ériger en exemple pour la cause féminine.
Sur son blog personnel, l'ancienne batteuse de la chanteuse M.I.A a expliqué pourquoi elle s'est finalement décidée à ne pas bloquer son flux pour courir devant les caméras du monde entier :
"Je n'ai jamais fait de sport pendant mes règles. J'ai donc pensé aux différentes options qui s'offraient à moi. Courir 42 kilomètres avec un tampon coincé entre mes cuisses m'a tout simplement semblé absurde, sans compter que la sensation de friction est très désagréable. Honnêtement, je n'en avait pas du tout envie, même si je me savais chanceuse d'appartenir à une société où les protections pendant les règles étaient la norme."
Dans certaines sociétés où le statut des femmes est relégué au second plan et où la pauvreté touche la majorité de la population, ces dernières n'ont d'autres choix de se cacher ou pire encore, de se mettre en danger. D'origine indienne, Kiran a donc bien conscience du problème et souligne ostensiblement le fait que seules 12% des femmes indiennes auraient aujourd'hui accès à des protections périodiques. Pour celles qui ne le peuvent pas, faute de moyens, l'unique solution reste encore de se servir de vieux chiffons ou de feuilles d'arbres, qui peuvent déclencher de graves infections.
Révoltée contre cette injustice sociale, Kiran se dresse de manière plus générale contre la façon dont les règles sont perçues par les autres :
"Pendant que je courais, j'étais en train de penser aux hommes et aux femmes qui ont été éduqués en éludant complètement le sujet. En établissant une sorte d'omerta honteuse autour des règles, la société a mis de côté un problème qui concerne 50% des êtres humains de cette planète. Pour respecter ce voeu de silence, les femmes n'osent donc jamais évoquer la peine qu'elles peuvent ressentir sur leur lieu de travail."
D'abord inquiète de l'effet qu'elle pourrait susciter parmi le public et ses proches, Kiran termine finalement sa course sous les meilleurs hospices :
"Autour de moi, j'ai vu d'autres personnes qui s'affichaient pour faire passer un message de douleur et de persécution. Il y en avait un pieds nus, un autre qui faisait du karaoké et même un homme qui courait avec la croix de Jésus placardé sur le dos. J'ai réalisé que tout le monde faisait cette course dans un but personnel et que j'étais le cadet de leurs soucis."
En bref, personne n'a finalement fait attention à Kiran, ou ne s'est permis de lui faire une réflexion désobligeante. Un soulagement pour la jeune femme qui se sentira même soutenue par sa famille à son arrivée. Ovationnée par le public, la performance de Kiran fait aujourd'hui le buzz sur la Toile et permettra peut-être à d'autres femmes de continuer à libérer la parole sur ce sujet délicat.
Sur Twitter en tout cas, de nombreuses femmes se sont mobilisées pour remercier Kiran. Une belle récompense pour la jeune femme, qui n'espérait finalement qu'une chose : éveiller les consciences.