Début mai, c’est un article du code pénal définissant le harcèlement sexuel et jugé « trop flou » qui avait conduit les sages du Conseil constitutionnel à abroger la loi concernant ce type d’agissements. Une décision déplorée par les associations féministes, qui avait créé un vide juridique sur la question. Juste avant d’être élu président, François Hollande avait donc promis de présenter un nouveau texte au Parlement. Les parlementaires s’étaient rapidement saisis du sujet : sept propositions de loi avaient été déposées par des sénateurs de tout bord. Finalement, le Premier ministre Jean-Marc Ayrault a tranché en faveur d'un projet de loi dont le texte, préparé conjointement par les ministres de la Justice et des Droits des femmes Christiane Taubira et Najat Vallaud-Belkacem, sera présenté ce mercredi en Conseil des ministres.
Et pour cause, le vide juridique actuel crée une situation d’urgence. « En dépit d'une circulaire de la chancellerie, les tribunaux annulent les poursuites pour harcèlement sexuel sans chercher à les requalifier, par exemple en violences volontaires ou tentative d'agressions sexuelles », déplore ainsi Marilyn Baldeck, déléguée générale de l'AVFT (Association européenne contre les violences faites aux femmes au travail), qui évoque des centaines de dossiers en souffrance. Pour autant, hors de question de se contenter d’un texte bâclé.
Hier déjà, alors que le contenu du projet de loi filtrait dans la presse, il recevait des réactions contrastées. « Dans un certain sens, on salue la démarche de consultation du gouvernement auprès des associations féministes. Dans le projet de loi, on sent une intention de prendre en compte la réalité des victimes », a ainsi réagi Gwendoline Fizaine, juriste chargée de mission à l’AVFT, nuançant aussitôt : « le projet de loi est bien trop compliqué pour être facilement compréhensible et applicable. Il y a beaucoup de conditions qui sont présentes, qui se surajoutent, qui disparaissent dans certains alinéas, etc. » La juriste regrette également que la forme de harcèlement la plus sévèrement punie le soit toujours moins qu’un simple vol. « On a une hiérarchie inacceptable entre ces deux atteintes, celle au bien et celle au droit des femmes et du travail ».
Gwendoline Fizaine, de l’AVFT, espère donc que le texte pourra être amendé. « Nous avons été invités à faire des retours, on en a déjà fait. Et on espère que le texte va évoluer », confie-t-elle. Un point de vue partagé pas la sénatrice Chantal Jouanno, qui, tout en soulignant l’urgence de cette loi, a d’ores et déjà prévenu que le texte présenté mercredi en Conseil des ministres n’était pas satisfaisant et devrait être modifié.
Crédit photo : AFP
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