Judith Godrèche n'en finit plus de parler, et chacun de ses mots comptent. Celle qui vient de porter plainte contre Benoît Jacquot, pour "viols avec violences sur mineur de moins de 15 ans commis par personne ayant autorité", et également dénoncé des agressions sexuelles dont serait coupable Jacques Doillon, s'est longuement exprimée au micro de Médiapart l'espace d'une table ronde nécessaire dédiée au #MeToo du cinéma français.
Pour l'actrice, qui à propos de Benoît Jacquot a témoigné de violences physiques, sexuelles, psychologiques, il est important d'expliquer pourquoi sa prise de parole n'est pas advenue plus tôt. C'est à la fois difficile à relater, et aisé à entendre. On l'écoute, chez Médiapart donc : "A mon époque, la possibilité du non n'existait absolument pas"
"Je n'ai jamais pu entrevoir, imaginer, penser à cela. La femme de Jacques Doillon était derrière le combo. Comment aurais je pu penser que j'avais le droit de dire non ? Les adultes pensaient que cette situation était normale... Je me souviens détester profondément Jacques Doillon, éprouver du dégoût, mais qu'il m'était impossible de le formuler".
"Je ne vois pas à quel endroit, à quel moment, j'aurais pu... [...] La position des actrices, de rester à leur place d'objet, démontre l'idée très forte d'omerta". Une parole puissante. Et qui ne s'arrête pas là. Car Judith Godrèche a également eu une riche idée sur Instagram : proposer une adresse email afin d'inviter ses followers victimes d'abus à lui envoyer leurs témoignages.
"Je suis là. Derrière cette adresse e-mail. Prête à vous lire et à réfléchir à un projet qui vous rend hommage. Quel que soit le milieu dans lequel vous avez été abusé(e)", a-t-elle précisé. Cette adresse email, la voici : moiaussijudith@gmail.com
"Vous pouvez me dire : moi aussi", écrit encore l'actrice. Une parenté évidente à #MeToo... Et en plus de gérer cette adresse email, c'est également sur France 5 que Judith Godrèche a ouvert la voix. Sur le même sujet, autrement dit, son témoignage, et ses potentielles incidences. On l'écoute, dans "C Ce soir" : "Avec ce témoignage je m'en suis pris à beaucoup d'esprits établis. Je m'en suis pris à l'État, au CNC, aux Cahiers du Cinéma, à Télérama.... Je ne travaillerai plus jamais !... Car je me fais pas beaucoup d'amis"
Judith Godrèche était revenue sur ce que lui aurait fait subir Jacques Doillon durant le tournage de son film, La fille de quinze ans : "Sur le tournage, il a engagé un acteur (...), il l'a viré et il s'est mis à la place. Tout d'un coup, il décide qu'il y a une scène d'amour, une scène de sexe entre lui et moi. On fait 45 prises. J'enlève mon pull, je suis torse-nu, il me pelote et il me roule des pelles".
Et Libé de décrypter : "La plainte de Judith Godrèche déposée mardi contre Benoît Jacquot et Jacques Doillon pour "viol sur mineur" met en lumière l'appétence malsaine des cinéastes des années 80 pour les jeunes filles. Une érotisation qui a broyé de nombreuses actrices".