La victoire, demeurée incertaine jusqu'au dernier moment à cause du boycott d'une partie de l'opposition, s'est bel et bien calquée sur les résultats des législatives de février, où le nom de Vjosa Osmani avait rassemblé plus de 300 000 voix. Présidente en interim du Kosovo depuis l'inculpation de Hashim Thaçi pour crimes de guerre en novembre par la justice internationale, la jeune femme de 38 ans a été élue par le parlement national ce dimanche 4 avril, avec une majorité de 71 voix sur 120 député·e·s.
Un scrutin qui a eu lieu deux semaines après l'intronisation du nouveau premier ministre et leader du mouvement réformiste de gauche Vetëvendosje (VV), Albin Kurti, son allié, et qui incarne l'arrivée d'une nouvelle génération de dirigeant·e·s après le règne des commandants indépendantistes de la guerre contre les forces serbes (1998-1999).
Les enjeux principaux de ce nouveau duo exécutif : lutter contre la corruption dans une région où l'instabilité politique et la pauvreté n'ont de cesse de diviser, renouer le dialogue avec la Serbie, et continuer d'installer les femmes sur le devant de la scène.
Juriste de formation, professeure de droit à l'université de Pristina, la capitale du Kosovo, et féministe chevronnée, Vjosa Osmani a fait son doctorat aux Etats-Unis et parle cinq langues : l'albanais, le serbe, l'anglais, le turc et l'espagnol. Rentrée au Parlement en 2011 au sein du parti, présidentiel alors, de la Ligue démocratique du Kosovo, elle part à l'aube de 2020 et crée sa propre formation, baptisée Guxo ("Osez" en français) avant de rejoindre le Vetëvendosje ("autodétermination" en français).
Aujourd'hui présidente du Kosovo au sein d'un gouvernement qui compte six femmes ministres sur quinze (du jamais vu dans ce pays aux valeurs patriarcales profondément ancrées) et où un tiers des député·e·s sont des élues, elle scande avec émotion : "Les femmes ont le droit d'être là où elles le veulent. N'arrêtez pas, n'arrêtez pas d'aller de l'avant. Tous vos rêves peuvent devenir réalité". Des mots inspirants qui résonnent dans une société particulièrement touchée - économiquement comme socialement - par la pandémie.
En 2021, ce sont ainsi 1,8 millions de personnes sous le seuil de pauvreté qui ont été recensées, quand le chômage des jeunes grimpe à 50 %. Face à ces maux qu'elle entend soigner grâce à la "justice et des emplois", Vjosa Osmani l'affirme : la corruption des élites en est une cause redoutable.
"Rien ne sera possible si nous ne démolissons pas le mur énorme et solide du crime et de la corruption érigée au fil des années", assure la femme politique. Lors de sa prestation de serment, elle s'est engagée à "renforcer l'Etat, l'Etat de droit", et aussi à être la "présidente de tous". "Nous ne sommes pas si nombreux pour nous diviser. Ma porte sera ouverte à tous", a-t-elle promis comme le rapporte Libération.
Sur Twitter, le 8 mars dernier, elle lançait : "Continuez à croire, continuez à vous battre, continuez à lutter pour le changement et l'égalité. Ensemble, nous bâtirons un avenir meilleur". Un vent d'espoir qui, force est de le constater, a su conquérir.