Pour la « Manif pour tous », la mobilisation de ce dimanche vise à « avertir le gouvernement le plus tôt possible de notre refus de l'ouverture de la PMA (procréation médicalement assistée, ndlr) aux couples de femmes et de la GPA (gestation pour autrui, ndlr) car tout enfant a besoin d'un père et d'une mère », expliquait mercredi dernier Ludivine de la Rochère, nouvelle présidente du mouvement. Pourtant, et contrairement au mouvement contre la loi Taubira, les revendications de ce dimanche apparaissent nettement moins claires.
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Pire, certains des griefs, comme la lutte contre la GPA dont le président de la République et le gouvernement ont répété maintes fois qu’elle ne serait pas légalisée au cours du quinquennat ou la lutte contre une supposée « théorie du genre », et les rumeurs qui l’entourent, paraissent des bases bien frêles pour mettre sur pied un mouvement national. Alors quels sont les véritables enjeux de « la Manif pour tous » ce dimanche ?
Le test principal de la mobilisation de ce dimanche restera le comptage du nombre de personnes présentes. Si Ludivine de la Rochère ne s’attend pas à ce que la mobilisation record contre la loi Taubira d'un million de personnes soit atteinte, elle planche tout de même sur 300.000 personnes. À Paris, la préfecture de police table plutôt sur 80.000 à 100.000 manifestants. La multiplicité des revendications, mais aussi les risques de débordement pourraient toutefois rebuter certains militants. Quelques 200 bus de 80 places ont été affrétés pour le trajet jusqu’à Paris.
Manuel Valls a prévenu: ses services ne toléreront « aucun débordement ». Le ministre de l’Intérieur vise notamment par ces propos les groupuscules d’extrême droite (pour certains officiellement dissous) éparpillés dans le cortège, mais aussi le mouvement « Manif pour tous » qui avait en début de semaine repris à son compte des rumeurs infondées sur le contenu de l’expérimentation « ABCD de l’égalité » dans les écoles primaires. « Croyez-moi le gouvernement, l'Etat, les forces de police, la justice seront d'une très grande sévérité, face à tous ceux qui s'en prennent à nos institutions et nos valeurs », a avertit Manuel Valls.
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Le « Mariage pour tous » adopté reste au travers de la gorge de certains militants. Dix mois après l’adoption de la loi Taubira, et 7000 unions homosexuelles plus tard, les anti-mariage gay ont dû toutefois trouver de nouveaux mots d’ordre pour continuer d’exister. Mais avec des revendications sortant nettement du cadre, voire vagues, comme « l’asphyxie fiscale », la hausse du quotient familial, ou la hausse de la TVA à 10%, difficile de s’y retrouver. D’autant que cette multiplicité de revendications peut facilement passer pour n’avoir d’égal que celles d’un autre mouvement, le « Jour de Colère », qui battait le pavé dimanche dernier. La mobilisation de ce dimanche permettra-t-elle de voir en quoi la « Manif pour tous » se différencie de « Jour de Colère » ?
Autre challenge pour la « Manif pour tous » de ce dimanche, montrer que le terme de « familiphobie » a une pertinence au-delà des calomnies sur lesquelles il semble trouver son bienfondé. Les manifestants réclament en effet le retrait immédiat de l’« ABCD de l’égalité », expérimentation dans les écoles d’une dizaine d’académies, pour sensibiliser les enfants aux discriminations basées sur le sexe. Surtout, il s’opposent à une supposée « théorie du genre », qui serait à la source de « l’idéologie » du gouvernement, qui vise, selon eux, à la « négation des sexes ». En fait, de théorie, il n’en est rien, puis qu’il s’agit d’études sociologiques qui ont cours depuis les années 1970 et qui permettent de mieux comprendre quels sont les causes sociales de la discrimination basée sur le sexe.
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Depuis le lendemain de la « Manif pour tous » du 26 mai 2013, Frigide Barjot n’est plus l’égérie du mouvement. Elle en a fondé un autre « l’Avenir pour tous », pour partir à l’assaut des municipales. Elle s’est vendredi totalement désolidarisée du mouvement « face à la radicalisation et la violence qui montent ». Ne restent aux manifestant qu’à se trouver une nouvelle égérie en phase avec les nouvelles orientations de la « Manif pour tous »…