A l'approche du quart de finale tant attendu face à la France, le numéro 15 de la sélection américaine semble faire de chaque match une lutte personnelle. D'un média à l'autre, on l'appelle l'éternelle rebelle, la grande gueule, la sportive militante, la capitaine engagée. En pleine Coupe du monde, aucun de ses mots ne passe inaperçu. Bref, inutile de le cacher plus longtemps : on aime (beaucoup) Megan Rapinoe. Et voici pourquoi.
33 ans seulement et déjà un palmarès qui laisse pantois. Avec 47 buts et 156 sélections à son actif, la joueuse du Seattle Reign FC n'a plus à prouver ses compétences en tant que milieu de terrain. Finaliste de la Coupe du monde en 2011, Championne olympique en 2012, Vainqueur de la Coupe du monde en 2015, médaillée d'or aux Jeux Olympiques... n'en jetez plus.
Sa maîtrise sportive indéniable (contre l'Espagne récemment, mise à terre à raison de deux points contre un), Megan Rapinoe la conjugue à son engagement - inébranlable. En mars dernier, et auprès d'une vingtaine de consoeurs, elle ne s'est pas retenue d'assigner la Fédération américaine de football en justice pour discrimination. Et l'inégalité salariale entre joueurs et joueuses de haut niveau est loin d'être son seul combat.
En 2016, le quaterback Colin Kaepernic pose le genou à terre pendant l'hymne national américain afin de protester contre les violences policières impunies qui affectent la communauté afro-américaine. A l'unisson, Megan Rapinoe imite le geste le 4 septembre de la même année. Au sein d'une industrie aussi balisée que le football, la sportive revendique des convictions tout à fait personnelles. Et reste la preuve que le sport américain a beaucoup à dire sur le pays qu'il est censé représenter à travers le monde.
Son mur Instagram est blindé de symboles équivoques, de la fameuse affiche "HOPE" de Barack Obama, auquel elle déclare toute son admiration ("Merci au président Barack Obama et à la Première dame Michelle Obama, pour votre intelligence, votre compassion et votre courage, votre style, votre grâce et votre style : merci de vous battre pour nous") à une citation de Martin Luther King Jr : "The time is always right to do what is right" ("Le moment est toujours bien choisi pour bien agir").
Le 2 juillet 2012, la sportive fait son coming out dans les pages du magazine Out. Elle y dévoile sa relation avec la joueuse de football australienne Sarah Walsh. Six ans plus tard, elle trône fièrement à la Une du magazine Body Issue, aux côtés de la basketteuse professionnelle Sue Bird, sourire de la victoire inscrit sur le visage. Elle est entièrement nue. C'en est fini de se cacher. De toute façon, ce n'est pas son genre : sur le terrain, Rapinoe affiche de flamboyants cheveux courts et roses. Une coupe qui captive le regard.
Durant son match, sa philosophie est celle de l'attaque et de la tactique, et en dehors, celle de l'intersectionnalité. Elle affirme publiquement son soutien à la communauté noire afin de fustiger ce qui l'opprime au quotidien. Elle, femme, sportive et lesbienne, sait ce que c'est que d'être invisibilisée. Sa militance est évidemment féministe : c'est l'égalité des droits entre les individus qu'elle recherche. Et le fait de voir cette défense des minorités incarnée par le pilier d'une équipe n'en est que plus réjouissant.
Au magazine Eight by Eight, l'attaquante américaine a récemment affirmé "[ne pas vouloir aller] à cette putain de Maison Blanche" en cas de victoire. Ce à quoi l'ancienne vedette de télé-réalité a rétorqué en toute subtilité : "Megan devrait d'abord gagner avant de parler ! Termine le travail !". Carton rouge pour le misogyne orange. Comme le laisse supposer son boycott de l'hymne américain le 16 juin dernier, Megan ne porte pas le milliardaire dans son coeur. Et n'hésite jamais à le faire savoir.
"Difficile de comprendre la peur que ressentent les gens, pourquoi et comment cette nation a choisi la division et la haine plutôt que l'unité, mais nous l'avons fait et nous devons comprendre pourquoi. Comprenez-vous les uns les autres, soyez ouvert d'esprit. Je ne défendrai jamais certaines des horribles choses que le président élu a dites et faites et personne ne le devrait jamais", déclame la footballeuse au peuple américain.
On le devine, son discours tacle les récurrentes diatribes trumpesques. "Un monde meilleur signifie un monde pour tous, toutes les races, tous les sexes, toutes les religions, orientation. Ne cédez pas à la peur, pas même une seconde" suggère-t-elle encore à ses followers. Avec son équipe comme avec son public, Megan Rapinoe prône l'union. Une idéaliste, en somme.