Témoigner, quand on est victime de violences sexuelles, n'est jamais simple. Que l'on soit une femme... Ou un homme. De ce point de vue là, un tabou semble perdurer, qui puise dans tellement de préjugés, d'injonctions à la virilité et de pressions diverses. Comme si un "vrai mec" ne pouvait être "une victime".
Absurde naturellement. Cependant, on constate que rares furent les hommes à apporter leurs voix au mouvement #MeToo. Outre atlantique, on pense à l'Oscarisé Brendan Fraser, ou à Terry Crews. En France, depuis très peu de temps, le mouvement #MeTooGarçons permet de dénoncer ces violences. Le comédien Aurélien Wiik l'a affirmé : "Les garçons du cinéma se réveillent ! S'il y a d'autres victimes, parlez ! Le procès et la reconnaissance du statut de victime sont importants. Ça aide à se reconstruire".
Mais c'est encore du côté des médias que les lignes bougent. La preuve ? Aujourd'hui, c'est l'animateur de C8, Jordan de Luxe, qui a décidé de parler. Dans son autobiographie "À quoi tu sers ?", le présentateur de "Chez Jordan" relate une agression sexuelle dont il aurait été victime. "Quelle horreur ! J'avais l'impression de nager en plein cauchemar...". On l'écoute.
Jordan de Luxe aurait été agressé sexuellement par un acteur de trois fois son âge, au tout début de sa carrière à la télé. Les faits se seraient produits durant une soirée, et au sein de l'appartement de l'agresseur présumé, en banlieue parisienne. L'acteur en question lui aurait fait des promesses d'ordre professionnel. Avant de lui faire boire un verre. Par la suite, c'est le trou noir. "Il s'est levé, s'est approché de moi... - j'ai encore des flashs de lui qui s'approche. Ensuite, c'est le black-out. Je ne me souviens plus de rien...".
Le lendemain, Jordan De Luxe se réveille "dans son lit, complètement nu, une capote usagée sur la table de nuit". Il poursuit : "Je me suis rhabillé. Ce matin-là, j'ai appris avec la force d'une gifle que le show business n'est pas fait de paillettes. J'éprouve encore la sensation d'avoir été sali".
Suite à la parution de son livre, c'est sur les plateaux, comme celui de BFM TV, que l'animateur développe ce témoignage douloureux, comme l'énoncent nos confrères de Puremedias : "Je devais rentrer chez ma cousine qui habitait assez loin de Paris. Mais il n'y avait plus du tout de métro. Cette personnalité-là m'a proposé de rentrer avec elle. J'ai été con parce que je n'aurais pas dû dire oui. Je me rends compte qu'une fois arrivé à la maison, c'est bizarre. Il y a une bouteille, une boisson alcoolisée et un verre. Je me demande pourquoi il ne m'a pas servi devant moi..."
Prendre la décision de parler, donc, quitte à susciter les pires réactions. Lesquelles ? Un classique : on doute de sa parole, on exige qu'il révèle l'identité de son agresseur présumé, on l'interroge, on l'accuse même de "protéger" celui qui l'aurait violé. D'aucuns se moquent, sur les réseaux sociaux. Tout ce "victim blaming", cette inversion de la culpabilité victime/agresseur, les femmes en font l'objet, les hommes aussi.
On se souvient à ce titre de ces mots du cinéaste et acteur Belge Bouli Lanners, victime de harcèlement sexuel. Bouli Lanners a témoigné, dans La Libre : "Tout le monde s'est moqué de moi quand j'en ai parlé – j'ai été harcelé par une réalisatrice plus âgée que moi. À chaque fois que j'ai commencé à en parler, les gens ont ri parce que j'étais un mec, parce que j'étais gros et que j'avais bien de la chance d'être là. Cette réalisatrice avait le pouvoir de. Et c'est celui qui a 'le pouvoir de' qui l'exerce sur l'autre. C'était extrêmement difficile"