A ceux et celles qui l'ignoreraient peut-être (sait-on jamais), Shakira est une artiste internationale qui excelle dans plusieurs domaines. Interprète de l'entêtant Whenever Wherever, maîtresse d'un déhanché mythique et performeuse applaudie du dernier Halftime Show, au Super Bowl, aux côtés de J-Lo, sa réputation n'est plus à faire. Elle est aussi maman de deux enfants : Sasha, 5 ans et Milan, 7 ans. Et ces dernières semaines, elle a ajouté une corde à son arc déjà bien fourni : la philosophie ancienne.
Sur Twitter, le 23 avril, elle publiait ainsi une photo d'elle tenant son diplôme à la main, qui la récompensait pour le suivi de quatre semaines de cours intensifs donnés par l'Université de Pennsylvanie, l'une des plus prestigieuses des Etats-Unis. "Je viens de terminer mon cours de philosophie ancienne de 4 semaines à l'université de Pennsylvanie", écrit-elle. "Je sais... mes hobbies sont très peu pratiques, mais il a fallu beaucoup d'heures après que les enfants se soient endormis. Merci Platon et ses prédécesseurs pour tout le 'fun' du mois dernier !"
Un texte avec une pointe d'humour qui n'inspire que des sentiments positifs - et peut-être un peu d'envie quant à sa capacité à conjuguer éducation des enfants et temps pour soi en plein confinement. Mais surtout, il rappelle que les mères ont une identité propre qui ne disparaît pas avec les premières couches sales.
Dans les commentaires, les mots tendres abondent. Une experte la félicite : "Cette égyptologue est très fière de vous. Merci de mettre en lumière le travail que tant de gens font sur le monde antique", un étudiant plaisante même sur une potentielle rencontre en classe : "Imaginez que le professeur dise 'ok, je vais former des groupes de deux au hasard pour ce devoir' et vous êtes avec Shakira". Et une internaute discute philo, forcément : "Félicitations Shakira ! C'est une grande réussite ! Je pense que l'allégorie de la grotte est particulièrement pertinente à notre époque, et c'est une chose à laquelle je pense souvent."
Tout va bien dans le meilleur des mondes donc. Sauf qu'évidemment, certaines ont saisi l'occasion pour pourrir l'ambiance. Un piètre "retourne au rock s'il te plaît" et, plus vicieux, un pavé sur la mauvaise mère qu'elle doit être pour avoir osé penser à elle entre deux histoires du soir : "Je ne pense pas que vous devriez perdre votre temps à suivre ces cours inutiles alors que vous devez vous occuper de vos enfants et de passer un temps précieux avec eux. Comment pouvez-vous considérer autre chose que du temps de qualité avec vos beaux enfants ? Ne sont-ils pas une priorité pour vous ?"
On aurait pu choisir de l'ignorer, mais cette intervention témoigne malheureusement d'un fléau nocif qui dépasse le simple cadre du commentaire déplacé : la culpabilité permanente et particulière qu'on fait ressentir aux femmes une fois qu'elles ont donné la vie. Heureusement, en 2020, les temps commencent à changer et la sororité à se dresser en rempart nécessaire face aux injonctions néfastes.
La preuve avec ces mots lancés en réponse au mom-shaming : "Je ne pense pas que cela vous regarde de savoir comment elle passe son temps. Ne l'emmenez pas sur la route de la culpabilité, celle d'être une 'mauvaise mère'. Soutenez les femmes et arrêtez d'essayer de leur faire sentir qu'elles ne sont 'pas assez'. Respectez-la, elle réussit à faire tout cela et à donner l'exemple aux femmes du monde entier." Exemplaire.