"Notre corps, on pensait le connaître, mais on réalise au fil du temps qu'il est notre plus cher inconnu. Qu'on l'aime ou qu'on le déteste, il nous enveloppe, il nous transporte, il nous identifie et nous signifie toujours ce que l'on n'a pas réussi à verbaliser." Par ces mots, les quatre créateur·rice·s de Ceci est ton corps, Aurélie, Noémie, Audrey et Jean-Yves, annoncent un projet aussi délicat qu'empouvoirant. Une suite de capsules et d'épisodes audio qui donnent la parole aux femmes, et aux liens qu'elles forment avec leur silhouette.
Aux jeunes femmes, aux femmes d'un âge plus avancé, aux femmes qui ont traversé de nombreuses épreuves, aux femmes qui veulent partager un sentiment profond, personnel et finalement, peut-être universel. "Nous en sommes convaincu·e·s, parler du corps des femmes est un acte politique. On le fait pour soi, mais aussi pour celles qui nous précèdent, qui nous entourent, et qui nous suivent", signent-ils.
La question qu'on leur pose est simple dans sa forme, mais complexe et riche dans le sens qu'on peut lui trouver : quelle relation entretenez-vous avec votre corps ? Ou plutôt, avec une partie définie de celui-ci. Car à chaque saison, le podcast migre d'une zone à l'autre de notre apparence. Avec tout ce que chacune a à offrir, à raconter. Une invitation à se regarder avec des yeux plus tendres. Et surtout, à s'abreuver d'un maximum de récits possibles, pour paver la voie d'une diversité nécessaire bien qu'encore trop rare.
"L'idée qui sous-tend la démarche du podcast, c'est avant tout ça : être fière de son corps quel qu'il soit et participer à en représenter davantage, de corps différents", nous détaille justement Aurélie, co-fondatrice et voix de ce projet poétique et bienveillant. On lui demande si elle le définirait comme un projet "anti-bikini body", tant il encourage à s'aimer, elle nous répond qu'elle n'a justement pas souhaité orienter les témoignages.
"Je trouvais ça très intéressant de ne pas associer tout de suite le mot 'complexe' [à ces confidences], un terme qu'on entend souvent quand on parle de nos corps." A la place, elle explique préférer une entrée en matière "plus neutre", "pour laisser tout l'espace aux femmes de s'exprimer. De permettre à l'intervenante de faire le récit de son cheminement jalonné par les grandes étapes de la vie. Raconter ce qu'elle veut, que ses mots prennent le pas." C'est réussi.
Sur les 13 épisodes parus entre le 8 mars (date hautement symbolique) et le 3 mai cette année, incarnant le premier chapitre dédié aux seins, on découvre des déclarations d'amour de femmes à leur poitrine, des souvenirs douloureux liés à la maladie, des reconstructions parfois difficiles, des parcours d'acceptation qui prennent du temps, jusqu'à ce qu'un lien puissant se forge, des transformations - physiques comme psychologiques - associées à la maternité.
"Certaines m'ont dit avoir eu ce sentiment de soulagement, de fierté, d'avoir mis des mots, d'avoir articulé leur narration", poursuit celle qui se définit d'ailleurs comme une "passeuse d'histoires". Autant de réflexions qui vont au-delà du corps en lui-même, autant de fenêtres sur des vécus, des réalités multiples, qui nous donnent envie de découvrir la prochaine saison. Et qui font du bien.
A ce sujet, au mois de juillet, c'est le ventre qui sera mis à l'honneur. Un sujet "très large", affirme la jeune femme, qui décrit quelques angles qui pourront être abordés par ce biais : la grossesse, le désir et non-désir d'enfant, le post-partum, mais aussi les troubles digestifs et l'héritage transgénérationnel que cette partie du corps peut incarner. Là encore, le programme s'annonce passionnant. Et les intervenant·e·s variées, notamment en âge.
"Pour moi, il est important cet aspect-là, d'aller chercher les récits des femmes qui ont la soixantaine, je le trouve autrement intéressant. C'est très précieux. Un jour, on abordera peut-être la ménopause. Cela nous permettra, à nous comme aux auditrices, de savoir aussi ce qui nous attend."
Et par la même occasion, de déboulonner un tabou qui peine à se lever. "Les corps et les vies de femmes sont tellement cycliques, changent tellement tout le temps - avec les enfants évidemment mais aussi plein d'autres choses - là où le corps des hommes est beaucoup moins changeant", poursuit-elle. En s'enrichissant de l'expérience de l'Autre, on arrive à une "vision plus élargie", résolument salutaire.
Et Aurélie de conclure : "Les effets sont vastes sur celles qui racontent mais aussi sur celles et ceux qui écoutent". On ne peut que confirmer.
Ceci est ton corps, disponible sur toutes les plateformes d'écoute.