Boire de l'alcool aurait des conséquences sur le taux de natalité ? C'est en tout cas ce qu'affirme Jarosław Kaczyński, le leader du parti conservateur polonais Droit et justice (PiS). L'homme politique a ainsi demandé aux Polonaises de réduire leur consommation d'alcool afin de redresser son pays.
"Si rien ne change, c'est-à-dire que si jusqu'à l'âge de 25 ans, une jeune fille boit autant que ses contemporains, elle ne fera pas d'enfants. Parce qu'il faut se rappeler qu'un homme, pour devenir alcoolique, doit boire excessivement pendant 20 ans en moyenne et une femme seulement deux ans", a-t-il ainsi déclaré ce 5 novembre lors d'une réunion publique.
Jarosław Kaczyński a affirmé que c'est "le meilleur spécialiste de l'alcoolisme en Pologne" qui lui aurait donné ces informations. Ce professionnel de santé aurait déclaré avoir "réussi à guérir un tiers de ses patients hommes de l'alcoolisme mais aucune femme". Mais hormis ce mystérieux expert, le responsable politique ne s'appuie sur aucune source scientifique tangible, et se permet de faire peser sur les femmes une nouvelle injonction de manière complètement gratuite.
Une telle sortie, de la part d'un membre du parti conservateur qui plus est, n'a pas manqué de faire réagir les féministes polonaises.
"Kaczynski a montré qu'il ne savait rien des femmes, de nos projets, de nos rêves et de la vie. Mais il s'est donné le droit de décider de nos vies, de nos rêves et de nos corps. C'est une source de malheur pour les jeunes femmes polonaises", a tweeté Barbara Nowacka, femme politique polonaise de gauche et féministe.
Les femmes polonaises ont en effet vu reculer certains de leurs droits avec le retour au pouvoir du parti conservateur, dès 2015. La Pologne a ainsi largement durci l'accès à l'avortement. Depuis 2020, il est aujourd'hui quasiment interdit, y compris en cas de malformation de l'embryon, ce qui avait déclenché de nombreuses manifestations.
"Il s'avère que lorsque les femmes polonaises boivent de l'alcool, selon les sexistes, elles sont non seulement responsables de viols, mais aussi d'une faible fécondité en Pologne", écrit ainsi une autre internaute.
La Pologne connaît par ailleurs une réelle baisse de son taux de natalité : selon la Banque mondiale, le pays enregistrait une moyenne d'1,39 enfant par femme en 2020. Cela constitue un vrai problème pour l'avenir du pays : il lui faudrait atteindre une moyenne d'environ 2,1 enfant par femme pour éviter une baisse de sa population. La Pologne se situe par ailleurs en dessous de la moyenne européenne, qui serait de 1,53 enfant par femme en 2019, selon l'Institut national d'études démographiques (Ined).
Le quotidien polonais Dziennik Gazeta Prawna explique la chute de la natalité par, entre autres, "la diminution du nombre de mariages" ainsi que "les craintes des femmes enceintes et des futures mamans de ne pas pouvoir accéder au système de santé tant que dure l'épidémie (de Covid-19- ndlr)".
De plus, "bien que la situation sur le marché du travail ne soit pas si mauvaise, le taux de chômage a augmenté. Or, depuis de nombreuses années, la recherche montre que le sentiment de manque de stabilité est l'une des principales barrières à la décision d'avoir des enfants", comme le rapporte Courrier International.