De charmantes femmes vêtues de jupes, qui remettent des fleurs et (surtout) des bises aux grands vainqueurs du Tour de France. On s'est depuis longtemps habitué à la présence des hôtesses sur le podium de la Grande Boucle. Trop longtemps, certainement. C'est ce que nous suggère une pétition initiée par des militantes féministes et mise en ligne sur le site change.org. L'idée ? Mettre fin à cette "tradition sexiste".
"Est-ce vraiment indispensable que cela fasse partie d'une cérémonie de remise de prix ?", s'interrogent celles qui, aujourd'hui, désirent que cette cérémonie quelque peu désuète évolue. Et en particulier l'image que cette tradition raconte sur la condition des femmes. A savoir un statut de "décoration" ou de "récompense" réservée aux cyclistes. Une certaine idée de la "femme-objet" qui se perpétue sans que l'on sache réellement pourquoi.
"Les baisers des femmes ne sont pas des récompenses ! Les femmes sont des sportives, des athlètes, battent des records, peuvent monter sur les podiums et servir de modèles aux héroïnes en herbe !", souligne Fatima Benomar. L'espace d'un thread, la membre d'Osez le féminisme et cofondatrice de l'association Les Effronté·e·s, s'en prend à cette tradition aussi vieillotte que Poulidor. Le 23 juillet, elle manifestait aux côtés des initiatrices de la pétition au siège d'Amaury Sport Organisation, l'organisateur du Tour de France, en compagnie d'un podium, de sportives mais aussi d'hommes torses nus, "pour souligner le ridicule de la situation par l'inversion des rôles", écrit-elle.
"Les femmes ne sont pas des potiches ou des objets sexuels", ajoutait-elle alors au sein d'une vidéo postée sur Facebook. La militante n'est pas la seule à la penser. La pétition réunit 26 000 signataires. Et la plus forte visibilité médiatique des sportives pourrait bien faire pencher la balance en faveur du renouveau. Mais la lutte est longue.
Alors que l'ASO s'est contenté d'ignorer leurs protestations, Fatima Benomar déplore le cyberharcèlement massif qu'elle subit désormais sur les réseaux sociaux, en particulier de la part de "la fachosphère". Sans pour autant baisser les bras. A la lire, les petites filles qui feront le Tour de France de demain ont besoin d'inspiration. D'exemples "qui ne leur renvoient pas juste le message qu'il faut qu'elles soient minces, jeunes et "jolies". Ou sachent faire la bise aux mecs.
En 2018 déjà, des élus parisiens du groupe Démocrates et Progressistes avaient demandé l'évolution de la cérémonie d'arrivée de l'événement sportif. Et par-là même la fin d'une tradition, "révélatrice des rapports femmes-hommes datant d'une autre époque". La pétition mise en ligne sur change.org date même à 2008 la promesse émise par les organisateurs du Tour de stopper ce protocole. Un engagement qui n'a pas été tenu.
L'an dernier, le directeur de la course cycliste Christian Prudhomme expliquait cette inaction avec l'argument du siècle : "pour les courses féminines, ce sont des hommes qui remettent les fleurs aux sportives, sur le podium. Je ne vois là aucune misogynie". No comment...