"Nuit noire en Anatolie", une plongée saisissante dans l'enfer du patriarcat
"Nuit noire en Anatolie", une plongée saisissante dans l'enfer du patriarcat
"Nuit noire en Anatolie", une plongée saisissante dans l'enfer du patriarcat
A l'instar du gigantesque "Les herbes sèches" de Nuri Bilge Ceylan, "Nuit noire en Anatolie" nous plonge dans l'enfer du patriarcat turc. Un captivant film noir hanté par les fantômes à découvrir en salles dès ce 31 janvier.
Quels fantômes hantent Ishak ? Solitaire tourmenté, ce dernier revient dans son village natal d'Anatolie après sept longues années d'absence afin de soutenir sa mère malade. Mais très vite, il se confronte à la véhémence de ses concitoyens alentour. Pourquoi ?
Au creux de ces interrogations, une terrible révélation que nous ne dévoilerons évidemment pas. Mais qui ne serait pas sans rapport avec un autre homme : Ali, le garde forestier... Ce récit mystérieux est celui de Nuit noire en Anatolie, film polymorphe conjuguant drame intimiste, immersion dépaysante aux confins de la ruralité turque, suspense morbide. Il faut découvrir en salles - dès ce 31 janvier - ce métrage aussi dépaysant que pesant.
Sous ses allures de chronique dramatique très introspective et contemplative - ce qu'elle est - Nuit noire en Anatolie dévoile peu à peu un autre visage : celui du film d'horreur. A sa manière. Déjà, car l'atmosphère étouffante qui envahit chaque séquence malgré le gigantisme des vertigineux paysages nous renvoie volontiers à Shining.
Ensuite, car le sujet qui palpite au coeur de ce récit rejoint celui du chef d'oeuvre de Stanley Kubrick : la folie des hommes. Ozcan Alper dépeint avant tout une communauté d'hommes aux attitudes antipathiques : homophobie décomplexée face au comportement d'Ali, le garde forestier, racisme, blagues misogynes fièrement déployées (qualifier notre héros, Ishak, de "bonne femme", car il préfère "rester à la maison")...
Ce mal, c'est naturellement le patriarcat. Et ce système primitif, notre protagoniste le rejette largement. Il y erre "comme une âme en peine", lui dit-on, obsédé par une certaine "nuit" dont l'on devinera peu à peu la teneur.
Et nous ressentons, à le voir évoluer dans ce contexte belliqueux, une sensation de danger qui affilie directement ce film à un genre passionnant : le survival. Soit, pour résumer, le récit de survie d'hommes en pleine nature, confrontés à l'agressivité d'entités assassines. Délivrance, Eden Lake... en sont de bels exemples, et Nuit noire en Anatolie décline le genre en l'actualisant avec son discours sous-jacent sur la masculinité. Redoutablement désespéré, cela va sans dire.
Si désespéré d'ailleurs que la lenteur de ce film hypnotique, tout comme son discours, fait écho au dernier grand traumatisme du cinéma turc : Les herbes sèches de Nuri Bilge Ceylan. Des affinités cinéphiles pertinentes pour un voyage qui saura vous captiver et vous faire frissonner, sans recours aux croquemitaines. Et pour cause : l'horreur qu'il dépeint est bel et bien réelle.