"La diffamation subie par Mme Heard et le harcèlement en ligne continu de cette dernière et de ceux qui lui ont exprimé leur soutien ont été sans précédent" ont écrit dans une lettre ouverte plus de 130 collectifs et militant·e·s féministes, cinq mois après le verdict du procès médiatique qui a opposé les deux ex-époux Johnny Depp et Amber Heard.
Johnny Depp accusait son ex-femme de l'avoir diffamé dans un éditorial de 2018 du Washington Post, dans lequel elle se décrivait comme "une personnalité publique représentant la violence domestique". L'article ne nommait pas l'acteur, mais la star de Pirate des Caraïbes a intenté une action en justice pour "laver son nom". Amber Heard avait contre-attaqué en l'accusant à son tour de diffamation.
Le procès très suivi qui a eu lieu en mai dernier en Virginie a eu un écho mondial et a exposé Amber Heard à des rumeurs, des insultes et du harcèlement. A l'issue du verdict, le 1er juin, le jury a accordé 2 millions de dollars à Amber Heard et 15 millions de dollars à Johnny Depp. Les deux parties ont depuis fait appel de cette décision, mais Amber Heard a été considérée comme la "perdante" de ce procès.
Pourtant, à Londres, en 2020, Amber Heard avait témoigné en faveur du tabloïd The Sun, qui avait qualifié Johnny Depp de "cogneur d'épouse". Elle avait raconté une dizaine d'agressions dont elle aurait été victime durant leur mariage. À l'époque, le juge en charge du dossier avait estimé que la plupart des faits rapportés lui semblaient "substantiellement vrais" et Johnny Depp avait donc perdu son procès en diffamation contre le tabloïd britannique.
"À notre avis, le verdict du procès Depp vs Heard et le discours continu autour de celui-ci indiquent une incompréhension fondamentale de la violence conjugale et sexuelle et de la manière dont les survivantes y réagissent", estiment les signataires, parmi lesquels figurent les associations Refuge, la Women's March Foundation, ou encore l'actrice Constance Wu.
Dans cette courte lettre ouverte, les auteurs et autrices du texte affirment qu'"une grande partie de ce harcèlement était alimentée par la désinformation, la misogynie, la biphobie et un environnement de réseaux sociaux monétisé où les allégations de violence domestique et d'agression sexuelle d'une femme étaient moquées à des fins de divertissement".
D'autant plus que "les mêmes mécanismes de désinformation et de blâme des victimes sont maintenant utilisés contre d'autres personnes qui ont témoigné d'abus", soulignent les signataires. "Les conséquences néfastes de la diffusion de cette désinformation sont incalculables. Nous sommes très préoccupés par l'utilisation abusive croissante des poursuites en diffamation pour menacer et réduire au silence les survivants."
"Nous condamnons l'humiliation publique d'Amber Heard et nous la soutenons. Nous soutenons la capacité de tous à signaler la violence conjugale et sexuelle sans harcèlement ni intimidation", concluent les associations et les militant·e·s.
A l'issue du verdict, Amber Heard avait déclaré : "Je suis dévastée par le fait que la montagne de preuves n'ait pas été suffisante pour faire face au pouvoir, à l'influence et à l'ascendant bien plus importants de mon ex-mari. Je suis encore plus déçue par ce que ce verdict signifie pour les autres femmes. C'est un revers. Cela remet en cause l'idée que la violence envers les femmes doit être prise au sérieux".