A première vue, on pense à une blague de mauvais goût. En y regardant de plus près, on s'aperçoit que le concept, aussi dangereux qu'inquiétant, ne laisse pas de place à la plaisanterie. Caché dans le web non indexé, Assassination Market invite chacun à devenir un tueur à gages payé par la communauté. Sur une page web épurée, le site annonce la couleur : « Parce que quand vous voulez frapper un Etat, tout le monde ressemble à un marteau ». La citation provient d'un des documents fondateurs du crypto-anarchisme, « The Cyphernomicon », écrit en 1994 par Tim May, un ingénieur d'Intel.
Assassination Market invite ses visiteurs à ajouter un nom à la liste macabre, puis à donner de l'argent de façon anonyme sous forme de Bitcoins, une monnaie électronique utilisée sur Internet, pour financer les assassinats. Les internautes peuvent ensuite prédire la date de la mort des cibles politiques, dans l'espoir de remporter la mise si la prédiction s'avère juste. Le tueur doit ainsi prouver, via un unique message crypté envoyé avant et après l'assassinat, qu'il est bien celui qui a éliminé la cible.
A ce petit jeu qui fait froid dans le dos, la tête du patron de la Réserve Fédérale américaine, Ben Bernanke, est mise à prix pour 124,14 bitcoins, soit plus de 100 000 dollars. La vie de Barack Obama est elle aussi mise aux enchères pour 40,26 bitcoins, soit 32.800 dollars. Parmi les autres cibles : le patron de la NSA, Keith Alexander, le directeur du renseignement national américain James R. Clapper, le Premier ministre finlandais Jyrki Tapani Katainen et la ministre de la Justice suédoise Beatrice Ask. Le président français François Hollande fait également partie des potentielles victimes. La tête du chef de l'Etat est ainsi mise à prix à 1 bitcoin (plus de 800 dollars).
Dans un email crypté envoyé au magazine américain Forbes, le créateur du site, un « crypto-anarchiste » se faisant appeler Kuwabatake Sanjuro, explique vouloir « changer le monde pour le rendre meilleur » en éliminant plusieurs leaders politiques pour « remettre le pouvoir entre les mains du peuple ». Selon Forbes, le site a été lancé sur le réseau Tor, qui garantit l'anonymat des utilisateurs et ne permet pas d'être retrouvé via une recherche Google traditionnelle. Contactés par le magazine, les services de renseignements américains et le FBI se sont gardés de tout commentaire, refusant même de confirmer qu'ils enquêtaient sur la question.